Morgane et ses nymphes est un film fort peu connu du cinéma français, comme d’ailleurs beaucoup de vieux films fantastiques de notre hexagone.
Ce n’est certes pas un chef d’œuvre, mais je pense qu’il ne mérite pas d’être complètement oublié.
L’interprétation est inégale. Clairement l’héroïne n’est pas géniale, avec un jeu très simpliste, qui rend mal les émotions, les sentiments, essentiels pourtant dans ce film. Heureusement, Dominique Delpierre en Morgane rattrape un peu l’affaire, avec une prestation sobre mais suffisamment charismatique pour convaincre, et Alfred Baillou est vraiment efficace. Doté d’un physique assez unique, il a une présence magnétique, et amène avec justesse le film dans la dimension irréelle qui est la sienne. A noter quelques seconds rôles savoureux, comme ces figurants dans l’auberge au début, qui ont la tête de l’emploi ! Dommage que les dialogues ne soient pas à la hauteur, et décrédibilisent souvent les acteurs (n’aidant évidemment pas ceux qui sont déjà à la traine).
L’histoire de son coté s’annonçait très sympathique. Le début est prenant, le glissement vers le fantastique et le conte est bon, mais ensuite ca patauge un peu. Le film fini clairement par manquer d’enjeu, et pour tenir (péniblement) 1 heure 18, il nous gratifie de scènes répétitives, peu intéressantes, même si certaines peuvent être belles à voir. Le rythme devient très mou, et il faut parfois se mettre une claque pour continuer le visionnage d’une traite sans somnoler. La fin est par ailleurs assez mal amenée. Clairement Morgane et ses nymphes aurait pu faire un bon moyen métrage, mais en long métrage la substance manque pour passionner.
Heureusement, sur la forme c’est mieux. La mise en scène de Gantillon est efficace. Elle est raffinée, travaillée, on sent un effort esthétique évident avec quelques audaces bien trouvées. Ce n’est certes pas là le travail d’un géant, mais sincèrement il y a avait beaucoup de promesses qui n’ont pas vraiment été tenue ensuite par le réalisateur. La photographie est assez soignée, même si elle n’est pas digne des décors. Ceux-ci sont en effet un des gros points du film. Il est tourné en décors naturels, et pour ce type de métrage, rien ne vaut l’Auvergne c’est clair ! Le début et la fin sont estampillés « Haute Auvergne » avec ses maisons en pierres pluriséculaires, ses paysages verdoyants, ses forêts. Au milieu c’est le château de Val et son lac, évidemment un lieu de conte de fée à lui tout seul. Dommage que les intérieurs soient un peu en retrait, même s’ils restent tout à fait honorables. Pour le reste, Morgane et ses nymphes n’est pas franchement un film érotique. Il se rapproche c’est vrai d’un Jean Rollin, mais du genre La Rose de fer. En gros le film montre quelques femmes à moitié nues ou en tenues vaporeuses. Ce n’est absolument jamais vulgaire, et même quelqu’un qui n’accroche pas trop avec la nudité pourra regarder ce film sans problème. Il n’y a pas non plus d’effets sanglants. La musique est un point ambivalent. L’ambiance sonore est particulière et originale, même si elle déconcertera certains, mais elle est trop peu présente, et c’est dommage.
Pour conclure, Morgane et ses nymphes est un petit film pas déplaisant, mais à voir prioritairement pour les habitués de ce type de métrage. Lent, très contemplatif, assez vide, il a le mérite d’être réellement onirique, et d’emmener le spectateur au pays du rêve (et malheureusement dans les bras de Morphée au passage). Visuellement très beau en dépit de son petit budget (une réédition sur un support de qualité et après restauration me paraitrait une très bonne chose), c’est avant tout un exercice formel, mais qui se suit tout de même. Il mérite 3.