La chronique qui tue ! Amen !
Viscéral, sanglant, émouvant tels sont les qualificatifs qui viennent cogner dans ta tête, tels des boules bonus au flipper, quand tu sors de la séance. Un grand regroupement d'émotions, éparses mais furieuses, qui te hanteront longtemps après vu ce film.
Construit en 3 actes bien distincts mais forcément complémentaires, c'est presque 3 films différents qui nous sont proposés - Ils sont pourtant imbriqués et inextricables - un film d'amour, un film de guerre bien sûr mais avant tout un film sur la Foi et l'abnégation.
Chacun de ces actes aurait pu faire l'objet d'un film et pourtant c'est leur assemblage qui donne cette patine et ce concentré d'émotions extrêmes.
Et c'est toute la force et le talent du Mel Gibson réalisateur d'en faire un film inclassable, il nous façonne un Golem, un monstre de boue et de chairs éventrées ; de cette chrysalide en putréfaction va sortir un papillon chatoyant, un moment de pureté hors du temps, un voyage aux confins de la foi. "Tu ne tueras point" est un film qui t'interroge sur tes croyances, le cinéma quand il est à ce niveau est un miroir réfléchissant.
Les séquences guerrières sont effroyables évidemment, brutes, sans concession, sans tabou. C'est la patte de Mel Gibson. Qui ne nous épargne ni l'horreur ni la douleur ni la souffrance. Les balles fusent, trouent les corps qui s'effondrent formant un amas humain sanguinolent. On ressent cet effroi qui tient cloué au sol, qui tord le ventre, un rendez-vous soudain et funeste avec la mort.
Vous l'aurez compris, c'est hyper réaliste, un ballet mortifère superbe qui renvoie quasiment la scène de débarquement du soldat Ryan dans ses pénates.
Il faut savoir que tu vas te contorsionner sur ton siège, frémir d'horreur, trembler de peur et pourtant tu vas recevoir une des plus merveilleuses leçons d'humanisme.
Le casting est d'une pertinence absolue, Andrew Garfield - qui joue le rôle de Desmond Doss, objecteur de conscience - a typiquement ce jeu pâlot et doucement habité qui convient parfaitement au rôle. À la limite du sacrifice Christique, c'est de l'amour et de la compassion qui émanent de son être. Du coup, il est juste et n'en fait jamais trop. Il n'est pas dans la performance ce qui aurait pu nuire au film ; sans exaltation mais droit dans ses bottes. L'importance d'un bon casting...
La touche de lumière et de respiration vient de chacune des apparitions de Teresa Palmer et de ses yeux de chats, deux billes bleues qui illuminent chacun des plans qui lui est dédié. Un peu d'amour dans ce monde de sauvages...
Vince Vaugh et Sam Worthington complètent ce casting de haute volée mais c'est Luke Bracey dans le rôle d'un teigneux Smitty Ryker qui emporte tout sur son passage.
Dieu que ce film est riche. Je parle de trois films mais s'il y a bien un fil rouge, c'est celui de la filiation, de la transmission de valeurs, positives ou négatives. Hugo Weaving qui joue le père violent et alcoolique de Desmond Doss, perclus de traumatismes de son passé d'ancien combattant, est la pierre angulaire qui conditionnera les choix de Desmond tout au long de sa vie. Le passé nourrit toujours le présent. Mais du chaos peut naître un miracle.