"In peace, sons bury their fathers. I war, fathers bury their sons".10 ans après le controversé Apocalypto, le retour de Mel Gibson en tant que réalisateur laissait présager une certaine attente au tournant de la part de la critique professionnelle. 2 jours après l'avoir visionné, je suis encore sous le choc !
Mel Gibson a d'abord fait un excellent choix en matière de sujet. Il nous raconte l'histoire de Desmond T. Doss, un soldat volontairement engagé comme médecin dans l'armée américaine à la suite de l'attaque de Pearl Arbor, à la condition expresse de ne jamais avoir à porter d'arme, conformément à ses convictions religieuses.
L'histoire de cet homme, le seul soldat américain objecteur de conscience à avoir reçu une médaille d'honneur du Congrès, est déjà incroyable et extraordinaire. Ce héros,
qui a sauvé 75 de ses camarades à lui tout seul,
est déjà un sujet en or pour un biopic. Mais ce film est bien plus que cela.
A l'instar de Full Metal Jacket et de nombreux autres films de guerre, il est en deux parties : une première partie sur "l'avant-combat", où l'on découvre l'enfance de Desmond T. Doss, puis son engagement dans l'armée et enfin sa préparation militaire. Vient ensuite son affectation dans la Compagnie B, 1er Bataillon , 307ème Regiment, 77ème Division d'Infanterie.
Imaginer un fantassin refusant de porter des armes, c'est un peu comme imaginer une lampe sans ampoule, c'est impensable, et on pourrait croire que c'est inutile ! Cette condition est pourtant essentielle à son engagement, et là-dessus Desmond Doss se montrera intransigeant.
Il ira (dans le film, mais pas dans la réalité) jusqu'à la cour martiale pour défendre ce droit fondamental à ses yeux.Ce qui au passage nous vaut l'un des moments les plus émouvants du film où son père, ancien militaire et écorché vif par les horreurs de la guerre, revêt son uniforme de caporal pour intervenir durant le procès, apportant une lettre signée par le Général Musgrove. La scène de la cour martiale serait totalement fictive (alors que paradoxalement le scénario a été jugé assez fidèle à la réalité par ailleurs)
La seconde partie, l'affectation à la bataille d'Okinawa, signe le début de la partie "action", où Mel Gibson met son génie créatif au service de la mise en scène des événements de ce terrible affrontement qui a causé plus de 20.000 morts côté US et 100.000 côté Japonais.
On connait l'expertise de Gibson dans l'art de retranscrire les scènes de combats et d'affrontements. Peu de réalisateurs arrivent à filmer aussi fidèlement à la fois l'absurdité et la violence incommensurable qui en découle. Le choix d'un épisode de cette bataille, la plus sanglante de la seconde guerre mondiale dans le Pacifique, n'est pas anodin et correspond bien à cette expertise. Et cette partie dépasse toute les espérances : jamais il n'a été donné de voir des scènes aussi terribles, aussi puissantes, aussi fidèles à l'horreur de ce que doit être un champ de bataille. Cela dépasse à mon sens tout ce qu'on a pu voir auparavant. Et c'est proprement fascinant. On s'y croirait, ce qui nous laisse un goût nécessairement amer dans la bouche, un mélange de stupeur de dégoût, d'une intensité rare. Rien qu'en cela, Hacksaw Ridge est un chef d'oeuvre, et LE film de guerre le plus abouti. C'est probablement sur cet aspect que les critiques s'en donnent à cœur joie, comme s'il l'on pouvait filmer une guerre sans en relater l'horreur. En cela, ceux qui reprochent à Gibson d'être trop violent sont tout simplement risibles ! Quant aux critiques sur l'aspect religieux du film, étant athée cela ne m'a pas choqué
même si la scène où le bataillon entier attend la fin de la prière / bénédiction de Doss avant de donner l'assaut sur Maeda Escarpment est un poil pénible, elle est rigoureusement authentique.
La distribution du film est tout simplement PARFAITE. les acteurs sont simplement EXCELLENTS, et un tel niveau aussi homogène est quelque chose de rare et précieux ! On distinguera tout de même l'incroyable performance de Andrew Garfield, totalement crédible, et qui arrive enfin à se défaire de son personnage de Spiderman, et qui pourrait prétendre à un Oscar. Impossible de ne pas mentionner Hugo Weaving, exceptionnel en père meurtri (qui lui aussi se détache enfin de son personnage d'Agent Smith), Vincent Vaughn, remarquable également. Saluons aussi le talent et la beauté de Teresa Palmer, plus belle que jamais.
Ce film devrait cumuler les prix, et rapporter quelques statuettes aux Oscars 2017. Rendez vous le 26 février pour voir si je me suis ou non trompé ! :)