Aaron Paul AKA Jesse Pinkman troque sa vieille Toyota 4WD, immatriculée au Nouveau Mexique, pour un Ford Shelby Mustang, le char des anges. Mais il troque aussi sa folle interprétation aux cotés de Bryan Cranston pour un rôle plus timoré, outil commercial dans les mains de producteurs peu scrupuleux et d’une firme vidéo ludique, Electronic Arts, qui profite de l’occasion pour faire une incroyablement publicité pour son jeu de course phare, l’éponyme Need for Speed. Sur consoles, sur écrans d’ordinateurs, la franchise se décline sous de multiples volets. Pour autant, le film de Scott Waugh en saisit l’essentiel, la base même du concept, et permet une approche très centrée sur l’univers basique du jeu, des jeux dans leur globalité. En soi, rien de bien trépidant outre l’appel du rugissement des gros moteurs, de l’univers de la course automobile fantasmée. C’est fun, c’est sexy, c’est bruyant et par-dessus le marché, c’est dans le sens contraire de la loi. Beaucoup d’entre nous, des hommes en majorité, apprécieront. Les autres oublieront bien vite leur mauvaise expérience.
A l’instar d’une célèbre franchise telle que Fast & Furious, la mécanique automobile se taille la part du lion. Mais au contraire des films de Justin Lin et consorts, Need for Speed s’avère un film nettement plus axé sur les véhicules que sur l’histoire de ceux qui les pilotes. En somme, Aaron Paul n’est qu’un avatar de luxe aux volants des vraies stars du long métrage de Scott Vaugh. Dans le fond, cela n’est pas si gênant. Reste que le scénario est très clairement le point faible d’un tel produit, faisant sans cesse fi de toute morale, présentant les routes américaines comme une formidable opportunité d’y faire la course et la police, une gêne de parcours, un obstacle pimentant la trépidante aventure du pilote. Voilà bien l’univers du jeu vidéo. Cela dit, si la machine est bien huilée une manette en main, en mode cinéma, la crédibilité du produit est franchement vaseuse, pour ne pas dire totalement absente. C’est donc parti pour quelques courses improbables et une traversée intégrale des USA en 45 heures montre en main.
Paradoxalement, c’est là que le film m’a plu, dans le sens ou cette mascarade de scénario semble pleinement assumée et que le fun est inconditionnellement la motivation des créateurs et autres scénaristes. Et à propos de fun, Need for Speed rempli son contrat. Ayant précédemment douté de la valeur technique du film, je me suis rendu compte, au fil de visionnage, que le dénommé Scott Waugh n’était pas franchement un maladroit au niveau de la mise en scène. Outre des superbes plans larges très spectaculaires, l’idée des caméras embarquées, là encore une intention de recoller aux jeux, est tout simplement géniale. Bon nombre de séquences de vitesse filmées depuis l’intérieur des véhicules sont splendides. En effet, dans l’ensemble, hormis quelques effets CGI insuffisants, Need for Speed est un film admirablement spectaculaires, ce que ne sont jamais réellement parvenus à faire les concurrents, notamment sur la franchise F&F.
Mais soyons clair, mon amour pour la belle mécanique, pour l’automobile, aura sans doute servi à améliorer mon jugement sur le film. Passer outre les belles prises de vues, ou l’impression de vitesse est remarquable, il ne ressort quasiment rien de constructif de ce film de commande. Invraisemblable, foutraque et dotés de dialogues aussi réfléchis que ceux d’amour, gloire et beauté ; Need for Speed pourrait alors s’apparenter au cinéma à ce que le jeu d’arcade est au jeu vidéo. Au finish, tout le monde y gagnent, à l’exception d’un Aaron Paul qui aurait mérité nettement mieux comme rôle pour sa première vraie incursion au cinéma. L’acteur, si impressionnant dans la série de Vince Gilligan, Breaking Bad, aura certainement d’autres opportunités pour laisser apparaître son talent sur grand écran. Mais Need for Speed doit avoir un goût amer pour lui. 11/20