Je n'ai jamais tenue Diane Kurys pour une grande cinéaste -elle a même réussi à faire jouer faux Sylvie Testut en Sagan! Mais elle vient de signer, avec Pour une femme, ce qui est sûrement son meilleur opus.
Deux frères, juifs russes. Famille communiste, immigrée en France. La guerre va les séparer. Le cadet, Jean (Nicolas Duvauchelle -qui se prend à avoir des airs de Patrick Dewaere!), se trouvait en camp de vacances au bord de la mer Noire quand elle a éclaté. Russe donc, il a été enrôlé dans l'Armée Rouge. Et on a perdu sa trace. L'aîné, Michel (Benoît Magimel, bien enrobé) s'était enrôle dans la Légion Etrangère, à cause de sa mésentente avec un père de famille difficile et brutal. Cela va lui sauver la vie, lorsqu'il sera interné à Rivesaltes; et lui permettra en même temps de sauver la vie d'une très jeune fille, Léna, juive russe elle aussi, en l'épousant.
Les débuts sont difficiles; il faudra attendre un an pour que le mariage ne soit plus blanc. Et finalement, ils deviendront un couple aimant comme tant d'autres. Ils ont une petite fille, Tania. Michel ouvre une boutique de tailleur. Quand Jean réapparait. Avec, autour de lui, tant de questions. Est ce vraiment lui? Comment a t-il pu sortir d'URSS? Que vient il faire en France?
Ce qu'on aime dans le film: d'abord, le formidable trio d'acteurs. Un bonheur. Léna, c'est Mélanie Thierry avec sa beauté bizarre, décalée, hors mode. {C'est quoi une beauté à la mode? J'ai regardé par curiosité le premier épisode du nouveau nanardesque Dallas. Il y avait trois rôles féminins. Eh bien, j'ai été incapable de les reconnaitre, ce qui ne facilitait pas la compréhension de l'intrigue. Brunes, cheveux lisses, maigres, visages réguliers, petit nez totalement dépourvu de caractère, absolument interchangeables. C'est ça, une beauté à la mode....}
On aime aussi Lyon, la plus jolie ville de France, et ses traboules, Lyon ici merveilleusement filmée.
Et surtout, on aime la façon à la fois tendre et cocasse dont la Kurys décrit la vie d'une cellule du PC, dans les années 50. Comment fait elle pour être si juste? Il y a bien longtemps que cela n'existe plus! Elle n'est quand même pas d'un âge si canonique, la Kurys! Cellule du PC avec Maurice, son secrétaire autoritaire mais plus cocu qu'un renne (Denis Podalydes excellent), sa femme Madeleine qui a le feu aux fesses (Clotilde Hesme, excellente aussi...
Tout cela est revécu par les deux filles du couple, Tania (Julie Ferrier) et Anne, alias Diane Kurys (Sophie Testud), lorsqu'à la mort du père (qui n'est sûrement pas celui d'Anne, mais ne l'a jamais montré), elles retrouvent des documents, des photos..... Et lorsque Anne recherche un livre qui lui apprendra que ce mystérieux Jean était, avec son pote Sacha (Clément Sibony qu'on a aussi toujours plaisir à retrouver), un chasseur de nazis, et qu'il a rejoint Israël qui le considère comme un héros. Chez Michel, le communiste a tué le juif; chez Jean, qui a constaté de visu comment ceux ci étaient traités en URSS, c'est le juif qui a tué le communiste.
Film intéressant, intelligent, touchant, réussi, avec pour celles (et ceux....) que ça intéresse, aussi une belle histoire d'amour.....