Qu’il est difficile de faire vivre un genre quasiment disparu. On le voit avec les péplums ou les films de pirates, que de rares exceptions parviennent à redonner quelques couleurs à leurs lettres de noblesse. Il en est de même donc pour le western : sa survie relève presque d’une lente et interminable agonie. Et on le voit à travers ce "Jane got a gun". Non pas parce que ce n’est pas un bon western. Au contraire, il est plutôt bon mais ne laissera pas un souvenir impérissable. Pourtant ce long métrage commence plutôt bien, avec une petite histoire de laquelle va être rapidement tirée et illustrée dans tout ce qui va suivre. Dans une ambiance crasseuse de poussière digne des plus grands westerns, apparait un homme à cheval dans la vallée aride, dodelinant de la tête avant de tomber à terre. Là résident les premiers codes du genre, des codes qui vont continuer à arriver avec la présentation de sales gueules. Des sales bobines qui là aussi on fait le succès de certains westerns. Comme le titre l’indique, le spectateur pense alors voir Jane (Natalie Portman) mener une chasse à l’homme. Certes Jane a un flingue, et il faut avouer qu’elle dégage une fière allure dès lors qu’elle s’équipe de ses armes à feu, de son chapeau et de son cache-poussière.
Mais ce n’est pas elle qui va manier son gun. Enfin très peu.
Le réalisateur prend le temps de développer la psychologie des personnages par l’intermédiaire de flash-backs pour nous amener de surprise en surprise, reléguant presque du même coup le règlement de comptes au second plan. Certains spectateurs diront (et c’est vrai) qu’on entre doucement dans l’intimité des deux personnages principaux avec une délicatesse inattendue (une délicatesse en total contraste avec la rudesse du mode de vie), d’autres diront qu’on aurait tout aussi bien pu développer sans ces flash-backs qui ont tendance à casser le rythme (c’est vrai aussi). On pourrait de ce fait reprocher un manque de rythme, mais ça change un peu de la brutalité qui règne sur ce genre de sujet où généralement ça cavale, ça tire et tue à tout va. Ce qui me dérange est que les flash-backs à l’image nostalgique jouent un peu trop le sentimentalisme par un apport de dramaturgie. Bien que "Jane got a gun" se démarque du western classique, il méritait à mon sens bien mieux, surtout si on tient compte du titre résolument accrocheur, et de la fière allure qu’a Natalie Portman : contre toute attente, ce n’est malheureusement pas suffisamment exploité pour ce western qui se voulait féministe, en faisant croire qu’une femme n’a pas besoin d’hommes pour survivre et découvrir du même coup la force qu’elle a de tapie en elle. Car finalement, quoiqu’on en dise, c’est bel et bien Dan Frost (interprété par un solide Joel Edgerton) qui dégage le plus d’assurance, même si Natalie Portman le porte. Au contraire, on a laissé la place à ce qui ressemble plus à un amas de confessions de dernière heure qu’autre chose, des confessions provoquées par la pression d’un homme implacable et infiniment dangereux, lequel aurait mérité d’être un peu plus exploité à mon goût. Il en résulte un western sobre mais sympa, sans être extraordinaire pour autant car on se doute de la fin, laquelle finit par un joli pied-de nez aux allures de pirouette
(la rançon d’une vie gâchée)
pour que demain… tout commence sous un meilleur jour…