« Jane got a gun » est un western qui colle parfaitement au genre et qui coche quasiment toutes les cases du cahier des charges du bon vieux western des familles. Sa seule originalité, mais elle est de taille, c’est qu’il met en scène la charmante Natalie Portman dans le rôle titre. Les femmes ne sont pas absente des westerns d’habitude, mais elles ne sont pas souvent autre chose qu’un second rôle, une sorte de faire-valoir du héros viril et mal rasé. Là c’est différent, « Jane got a gun » offre à Portman l’occasion de jouer du colt sous un soleil de plomb et sous un chapeau de cow-boy couvert de poussière. Mais en fait, le titre est un peu trompeur, on pourrait imaginer une jeune femme défendant seule son mari gravement blessée ou même partant en campagne pour le venger. Sauf que non, Jane est une mère de famille qui n’était pas prédisposée à devenir une femme dangereuse et vindicative. La preuve : la première chose que Jane fait pour se défendre est d’aller quémander l’aide… de son ex ! De ce point de vue au moins, le scénario n’est pas binaire et bêtement stéréotypé. Alors pourquoi ce titre ? Peut-être pour faire un clin d’œil à « Johnny got his gun », bien que les deux films n’aient rien à voir… Si le scénario est d’une simplicité étonnante (Jane veut se défendre contre des gros méchants bien méchants et elle se tourne vers son ancien grand amour par l’aider, ils attendent l’assaut qui finira bien par arriver vu que l’Ouest est grand mais le monde est petit), et les personnages un poil stéréotypés, particulièrement la bande à Bishop (sales, mal rasés, laids et bêtes à manger du foin, à part le chef qui lui, est propre et plus sophistiqué), le film se laisse suivre sans déplaisir parce qu’il est court, ramassé, bien rythmé, sans longueur et soigné dans sa forme. Les flash back sont amenés sans grande originalité mais ils sont courts et permettent rapidement de comprendre qui est qui et qui a fait quoi, les décors sont magnifiques et l’atmosphère forcément étouffante, la reconstitution soignée et O’Connor réussit quelques jolies plans, notamment dans les 20 dernières minutes du film. L’assaut tant redouté à lieu, évidemment, mais il a lieu de nuit et cela lui donne l’occasion de jouer avec la lumière, avec la pyrotechnie, avec les ombres et avec les sons inquiétants dans le noir. L’extrême discrétion de la musique est une autre bonne idée originale de « Jane got a gun », les scènes d’action ou de tension ne sont pas noyées dans une musique insistante et omniprésente, encore un bon point. Natalie Portman, que l’on ne présente plus, incarne une jeune femme à la fois forte et fragile, elle dose bien et avec justesse ce mélange difficile. A ses côtés, Joel Edgerton campe un ex fiancé à la rancune aussi tenace que le sont ses sentiments, un homme blessé qui semble toujours sur le point de trahir sa faiblesse pour Jane derrière une attitude bourrue. Là encore, ce n’est pas forcément facile à faire passer mais c’est réussi. Quant à Ewan Mc Gregor, je ne l’ai carrément pas reconnu dans son rôle de bandit sans foi ni loi, tellement il est bien grimé. Côté casting il n’y a pas grand-chose à redire et « Jane got a gun » aurait pu être un vrai bon film qui prend aux tripes avec un scénario un peu moins convenu et avec des rôles de méchants moins stéréotypés. C’est bien de coller aux codes du genre, c’est bien de vouloir faire un western moderne et « féministe » tout en y incluant un peu de romance mais il faut quand même se donner un peu de mal côté scénario. Parce que là, c’est agréable à regarder mais c’est sans surprise, et je passe pudiquement du l’image de fin avec le soleil couchant.
La fin, parlons-en, elle laisse un petit gout étrange de « happy end obligatoire », le fil blanc est un poil trop gros pour qu’on y croit vraiment. Je n’ai rien contre les films qui finissent bien mais parfois, un peu d’amertume dans une happy-end lui donne un petit gout original et crédible qui fonctionne.
« Jane got a gun » se veut un western moderne, féminin et dépoussiéré, mais en fait, à cause d’un scénario quand même très convenu, cela donne au final un western certes agréable, certes dépaysant mais on sent qu’on va l’oublier très vite, sitôt le générique de fin terminé. Il voulait marquer le genre, mais il ne restera pas dans les annales du genre, une sorte d’occasion manquée, en somme…