C'est dingue, car à chaque fois je dévalorise ce film, et quand vient le revisionnage je suis pris d'un profond regret d'avoir douté de la qualité de ce "Grand Budapest Hotel".
Je pense que je tiens cette posture vis-à-vis de ce film car, tout fan de Wes Anderson que je suis, et étant le plus grand (et de loin) succès critique et commercial du monsieur, il ne figure pas vraiment dans mes films vraiment préférés de cet auteur (mon éternelle dévotion allant vers "Rushmore", "Moonrise Kingdom", "L'Île aux Chiens" et surtout "La Famille Tenenbaum").
C'est donc quasiment naturel qu'étant donné son statut de meilleur film de l'ami Wes je sois disposé à trouver ce film surestimé (un comble du fait que ça a été ma porte d'entrée dans l'univers aussi barré que génial de son auteur) et à chaque fois je me fais avoir.
Car au final j'y reviens souvent dans cet hôtel, un peu comme un lieu de séjour dans lequel j'aime installer mes bagages de temps en temps pour aller visiter le coin.
C'est même sûrement l'un des films que j'ai le plus vu tout court, et pourtant j'arrive à oublier à chaque fois le plaisir immense que me procure ce film, bougre de moi.
Mais j'écris ces lignes pour me souvenir d'une chose maintenant que je viens de le revoir pour l'énième fois : ne pas douter.
Ne pas sous-évaluer ce film.
Car bon, c'est un fait : "The Grand Budapest Hotel" déchire.
Ce film n'a beau durer qu'une heure et demie, il renferme une immense richesse en posant les bases d'un pays fictif, la république de Zubrowka, et arrive à en tirer une intrigue rocambolesque, un "buddy movie" tout à fait réjouissant et hilarant, non sans sa dose d'émotions fortes.
En véritable alchimiste, Wes Anderson arrive à confondre en une seule scène le rire et les larmes, et ça c'est vraiment fort.
Hélas, l'émotion bien que forte n'atteint pas à mon sens la beauté qu'un film comme "La Famille Tenenbaum" pouvait avoir, et l'apogée émotionnelle de "The Grand Budapest Hotel" peine à rivaliser avec les moments les plus déchirants de la filmographie de leur créateur.
Là est la limite du film.
La seule limite.
Mais genre, vraiment la seule.
Car franchement, tout le reste brille de mille feux.
Les décors ont rarement été aussi beaux dans un film, les personnages, bien que nombreux, n'ont besoin que d'une scène pour exister et avoir leur propre personnalité, ce qui fait qu'au fond ils sont tous attachants, la réalisation si propre à Wes Anderson transpire la créativité à chaque plan dans lesquels on distingue clairement la patte de leur auteur, la sublime musique d'Alexandre Desplats dont je ne suis pas fan du style s'accommode à merveille avec l'ambiance burlesque et déjantée du propos, non franchement c'est un film sublime.
En utilisant le ratio 4/3 à son avantage pour en tirer des plans sublimes et des gags visuels parfaits, Wes Anderson arrive à effectuer un sans-faute, une œuvre maitrisée de A à Z, un film sur le passage de flambeau délirant comme magnifique, un film pour tous et pour tout le monde, d'une richesse folle.
Vraiment c'est le top, et destiné à être un futur film culte ce film ne cessera d'enchanter les générations pendant encore un bon bout de temps, il émerveillera pendant encore longtemps, soit grâce à sa beauté plastique, soit grâce à la puissance dévastatrice de son intrigue, soit par son univers complètement décalé.
Ce film forme un tout duquel il est compliqué de caser des mots et qui ne demande qu'à se laisser porter dedans.
Les hostiles au cinéma de Wes Anderson resteront sur la touche, les aficionados comme moi seront aux Anges.
Et clairement, je suis aux Anges.