Synopsis : Todd Haynes nous propose sa version de l’ouvrage de Patricia Highsmith plus connu sous le nom de « The Price of Salt » avec à la plume ni plus ni moins que Phyllis Nagy, amie proche de l’auteure.
En quelques mots : étincelle – doute – voyage initiatique – confiance
Mise en scène :
-Les années 1950 : véritable coup de cœur pour cette décennie, je ne sais toujours pas si c’est grâce à l’œil aiguisé du réalisateur ou tout simplement l’essence même de l’époque. Visuellement on ne se lasse pas de cette ambiance vaporeuse, teintée de quelques éclats de couleurs qui souligne toute la finesse de l’image.
-La confrontation de 2 classes sociales : 2 femmes, 2 vies – la confrontation de 2 univers évoluant dans une sphère temporelle pourtant identique. La classe bourgeoise, aisée, je ne sais quel adjectif lui attribué. Face à une classe plus ancrée dans les réalités qu’impose la jungle urbaine.
-2 personnages au tournant de leur vie : une femme, la quarantaine, mariée trop tôt à un homme trop intéressé par sa position sociale pour se soucier de son épanouissement émotionnel, un enfant qui lie le couple pense-t-on à jamais, à cette époque ou le divorce sonnait le glas d’une vie heureuse et l’émergence de regards inquisiteurs. Partagée entre une vie confortable mais ennuyeuse, et la joie de gouter à nouveau au fruit défendu, la raison n’a plus sa place jusqu’au moment où la réalité la rattrape.
En face, une jeune femme, la vingtaine, en quête d’un métier qui reflète enfin sa passion, et non plus un « job » alimentaire qui lui permet de payer son indépendance et d’avoir une place au sein d’une société qui commence tout juste à entrevoir le pouvoir réel de la femme dans le monde des affaires. Les hommes semblent s’intéressées à elle, mais elle, ne sais pas réellement ce qui les intéresse en eux. Mais c’est alors que l’étincelle jaillit dans sa vie. Tout d’abord intrigué par cette femme, la fougue du jeune âge la fait plongé à corps perdu dans une relation dont elle n’entrevoit que le voyage et pas la destination. C’est dans ce détail que réside la subtilité du personnage.
-La musique telle le cocon qui éclos, laisse entrevoir les méandres dans lesquels l’humain est prêt à se plonger pour gouter à ses propres désirs quitte à se perdre en chemin. Ponctuée d’artistes de l’époque, cette BO se déguste, se découvre au fil de la passion entre ces 2 femmes.
-Les costumes : je ne suis pas spécialiste en la matière, alors je me contenterai de dire qu’ils collent non seulement à l’époque bien sûr mais aussi au personnage. On peut constater vers la fin du film, l’évolution vestimentaire de Thérèse qui s’affirme et révèle sa personnalité forte et délicate. Au contraire, du personnage de Carol qui montre toujours une armure dont elle a du mal à se défaire.
Actrices :
-Cate Blanchett : Carol aura le mérite de m’avoir plongé dans la filmographie de l’actrice que je ne connaissais que très peu. Rien à dire sur le jeu, elle laisse transpirer le côté certes un peu guindé et froid de la femme bourgeoise des années 1950, mais c’est ce que le personnage reflète en grande partie. Je regrette toutefois que le personnage ne s’expose pas plus tôt dans le film, car dans l’ouvrage on a plus conscience de cette fragilité à travers l’armure.
-Rooney Mara : actrice en devenir, le rôle lui colle à la peau, la jeune femme qui se cherche, qui apprend à mieux se connaitre et à exprimer ses sentiments, sa colère, le jeu passe beaucoup par les regards, les gestes plus que par les mots. L’alchimie passe parfaitement à l’écran.
-Sarah Paulson : actrice que j’ai découverte grâce à American Horror Story, tient malheureusement dans le film un rôle de moins grande envergure que dans le livre. On ne découvre son importance qu’à l’occasion d’une seule scène où elle se retrouve seule avec Thérèse. Alors que dans le livre, sa présence est plus soulignée.
Réalisateur : Todd Haynes
C’est la première fois que je regarde un film de ce réalisateur, une chose est sûre, cela m’incite à en regarder d’autres. Il retranscrit avec tellement de facilité l’univers temporel et l’essence du livre que l’on se délecte de son art.
Rapport au livre / The Price of Salt
J’ai entendu parler du film pour la première fois lors du Festival de Cannes, mais je n’y ai pas prêté plus d’attention. Puis en voyant la bande annonce (qui ceux veulent toujours vendeuses), je me suis dit pourquoi pas, pour une fois que l’on peut voir une histoire d’amour entre 2 femmes au cinéma, avec des actrices connues pour porter l’histoire, c’était l’occasion ou jamais de se plonger dans l’ouvrage. Il est écrit avec tellement de délicatesse que je me demande encore pourquoi ils n’en ont pas voulu à l’époque, les scènes sont décrites de manière à laisser l’imagination du lecteur vagabondé. C’est peut-être cela qui dérange d’ailleurs, imaginer une histoire d’amour entre 2 femmes, cela relève de l’indécence bien entendu !