Commençons de manière brutale : je n'ai pas aimé ce St Laurent ! j'ai adoré l'interprétation de Gaspard Ulliel, encore qu'il manque légèrement de fragilité mais enfin il est plutôt très juste dans ce rôle et le campe magnifiquement bien. Louis Garrel, en Jacques de Bascher est relativement insignifiant mais en même temps Louis Garrel, que ce soit lors d'un photocall à Cannes, dans la pub Valentino ou dans ce film, ne peut s'empêcher d'afficher son rictus de séducteur, légèrement tête à claques mais que moi j'adore !
Alors oui la réalisation est plutôt moderne, parfois un peu métaphorique, sans vraiment être transcendante non plus ! en fait je suis assez sévère avec ce film parce que sous prétexte de découper des séquences en cases façon mondrian (rappel trop appuyé et trop explicite des robes dessinées par St Laurent), sous prétexte de nous offrir une belle bande son, sous prétexte de faire un biopic plus libre et ouvert que le St Laurent de Jalil Lespert (je ne voulais pas comparer mais c'est impossible), sous prétexte de nous montrer un essai erotico-baroque (et encore je ne sais pas si le mot érotique est employé à bon escient car ça ne l'est pas vraiment) je pense que Bertrand Bonnello passe à côté de son film : d'un côté nous n'échappons pas à une chronologie avec un rappel des années affichées en rouge sur la toile, de l'autre, le montage nous offre des séquences sorties de nulle part, trop cinéphiles pour moi et dont je ne sais pas encore si j'en chercherai le sens... les extraits de vieux films ne me semblaient pas indispensables, tout comme les plans où les monologues de St Laurent, vieux, face à ses oeuvres d'art et son imposant bouddha, m'ont profondément agacée. Pourquoi ? parce que selon moi, il commet l'erreur irréparable de ne pas avoir grimé Gaspard Ulliel en Yves St Laurent plus vieux. Et ce Helmut Berger aux traits tellement peu fins et absolument pas représentatifs d'un Yves St Laurent de porcelaine à l'aube de sa mort gâchent absolument l'ensemble du film. Quel dommage mais quel dommage !
par ailleurs, la relation entre Pierre Bergé et Yves St laurent nous suit évidemment à travers le film mais elle est vraiment en retrait, il ne se passe finalement pas grand chose entre les deux, hormis un ou deux dialogues trop courts.
Bref ! hormis le plan ou Gaspard Ulliel sort complètement nu de son dressing et de face, tant qu'à faire, je n'ai ressenti aucune émotion (si uniquement quand les serpents passent sur la peau de son torse, aux pigments hâlés, sublimés par la caméra).
Le St Laurent de Jalil Lespert avec Pierre Niney et Guillaume Gallienne était tellement sensible, fin, chaque mot était précis, les jeux de lumière absolument magnifiques, une photographie à couper le souffle,tellement esthétique... Et puis il y avait cette complicité entre deux acteurs magistraux dont on sent qu'ils sont aussi complices à la ville et surtout à la comédie française. Alors oui c'était plus classique, plus consensuel aussi sûrement mais c'est celui-là que j'aimerais revoir mais plus tard car je n'en ai encore oublié aucune scène... Selon moi Bertrand Bonnello ne va pas assez loin dans la signature d'un hommage mi figue mi raisin qui s'épanche sur les perversions et addictions de ce créateur de génie, sans jamais nous en dévoiler le côté brut et violent !
enfin ce film ne reste pas nul, très loin de là, les scènes en boîte, plutôt vintage et psychédéliques sont filmés sous des angles sympas, mais c'est un peu léger pour apprécier le film ....