Voilà du polar efficace, bien fichu, bien mis en scène et bien prenant, et çà fait plaisir à l’amatrice que je suis… Gilles Paquet-Brenner réussi, à partir d’un polar de Gillian Flynn que je vais m’empresser de lire, un thriller maîtrisé à tous les niveaux. D’abord, je souligne la qualité du casting et notamment des seconds rôles. Charlize Theron incarne très bien une Libby Day borderline, peu sympathique de premier abord, en marge de la société mais il n’est pas interdit de trouver qu’au début du film notamment, elle en fait peut-être un poil trop dans le genre « bad girl traumatisée ». En revanche, à ses côtés, Chloé Grace Morets, Drea Di Matteo mais surtout Corey Stoll et Christina Hendricks sont impressionnants. Pour ces deux derniers, çà fait plaisir de les voir sur grand écran après « House of Cards » pour le premier et « Mad Men » pour Christina Hendrick : sans maquillage et tenues ajustées à ses formes, la belle rousse incarne une mère célibataire ruinée de la plus touchante des façons. La réalisation de Paquet-Brenner est tout à fait convaincante, alternant le passé et le présent sans jamais nous perdre en route, se gardant bien d’abuser des effets un peu trop faciles du genre (musique qui appuie les scènes clés, surprises destinées à nous faire sursauter sur notre siège), il utilise ces petits trucs avec parcimonie, préférant à la place créer une atmosphère anxiogène par petites touches, et utilisant beaucoup les décors dans ce but. Le Kansa profond, très agricole, et très pauvre aussi, donne un aspect sombre et malsain à l’intrigue, comme le suggère le titre. Il s’appuie sur un scénario qui déroule l’intrigue comme une mécanique bien huilée : on ne découvre la vérité sur le massacre qu’à la toute fin du film et même si j’avoue en avoir deviné une petite partie, je me suis laissé surprendre par le dénouement, assez bien vu, assez malin… Il y a du talent chez Flynn, assurément. Les personnages sont complexes, ils donnent tous plus ou moins l’impression d’avoir des choses à cacher. Même s’ils sont moins machiavéliques que dans « Gone Girl », ils sont tout aussi inquiétants, qu’il s’agisse du père de famille toxico et violent, du copain indien fasciné par le satanisme, de la girlfriend friquée et légèrement psychopathe ou de Ben lui-même, adolescent mal dans sa peau en 1985 ou derrière les barreaux en 2013, mutique et presque passif devant les évènements. Plusieurs intrigues se mêlent, et elles finissent toutes par se nouer plus ou moins par hasard cette nuit funeste de 1985. Impossible d’en dire plus sans en dire trop ! Au rayon des petits regrets, on regrettera peut-être un final un peu téléphoné et dans le plus pur style des thrillers, et puis une toute fin qui tire inexplicablement en longueur. J’aurais personnellement amputé « Dark places » de 5-7 minutes, histoire de faire apparaître le générique de fin de manière plus brutale, un peu moins moralement correcte. Mais c’est un petit détail qui ne gâche pas la très bonne impression laissée par le thriller de Gilles Paquet-Brenner à qui on souhaite de persister dans cette voie…