Bon… ça va peut-être en choquer plus d’un, mais moi, ce film, il ne m’a apporté qu’une seule chose : il m’a juste fait prendre conscience que je n’en avais rien à faire de Steve Jobs. Mais vraiment rien à faire… Le pire, c’est que c’est sûrement là un sentiment trompeur. Peut-être qu’en vrai, si je me renseignais un temps soit peu sur la vraie vie du vrai Steve Jobs, peut-être qu’alors je pourrais trouver de l’intérêt à la vie de Steve Jobs. Mais là, c’est triste à dire : raconter comme ça, pour moi, c’est niet. Le film commence sur le lancement du Macintosh en 1984. Salle bondée, effervescence générale, enjeux économiques posés d’emblée… Alors pourquoi pas… Un « In medias res » pour commencer, ça met tout de suite du rythme et de l’intrigue. De la part d’un Danny Boyle, je n’en attendais pas moins. Mais bon, un « in medias res » à partir de quoi ? Du début jusqu’à la fin, le film ne semble limiter la vie de Steve Jobs qu’à ses présentations de machines ! Alors, encore une fois, pourquoi pas. Sur le papier ça aurait pu marcher : Jobs est un chef d’orchestre, son talent est dans la mise en lumière nous dit-on, et la répétitivité des présentations permet de jauger l’évolution du personnage, notamment en observant tout ce qui se raccorde à lui dans sa vie privée, notamment sa femme et surtout sa fille. C’était là la garantie d’une incarnation du propos et la promesse d’une vision globale de cette figure emblématique et controversée. Mais bon, entre le papier et l’écran, il y a clairement tout un monde. Parce que bon, en toute honnêteté, la mise en chair n’a absolument pas fonctionné sur moi. Au contraire, la démarche me semblait tellement artificielle que pas un instant je ne suis parvenu à m’y plonger. Et franchement, pour le coup, j’ai peur que la faute en revienne à Boyle lui-même. Faire dans le sous-entendu, dans la retenue, l’ami Danny ne sait pas faire. Transcrire des émotions, des passions, des transcendances, ça oui, il sait faire, il sait les incarner. Le gars dispose d’une réelle science du rythme dans la manière de gérer les flux d’images et de sons. Dans chacun de ses films, quand il fallait donner de l’élan, sa réalisation y parvenait toujours. Seulement voilà, dans un cadre aussi posé, dans une démarche aussi introspective, je trouve la réalisation de l’ami Boyle totalement hors de propos. Tout est beaucoup trop discursif dans le propos, trop nerveux dans le montage, trop chargé d’élans musicaux pour qu’à un moment donné la mayonnaise prenne. De mon point de vue, le liant entre la question des relations familiales de Jobs et son esprit d’homme d’entreprise ne s’opère jamais. Le premier devient clairement un kyste douloureux pour le second. Surtout qu’en fin de compte, le premier n’est finalement abordé que de manière très sèche, presque réservée qu’à ceux qui connaissent le personnage. L’Histoire du Mac, de Next, du Newton, de l’iMac, les bans concernant sa relation avec Steven Wozniak… Finalement tout cela ne peut parler que pour quelqu’un… qui en a déjà entendu parler ! Et vu que ceux qui en ont déjà entendu parler sont également ceux qui connaissent certainement le fin mot de l’histoire, une question se pose alors : « mais à qui peut s’adresser ce film ? » En tout cas, une chose est sûre, pas à moi. Seules les astuces formelles de Danny Boyle m’ont évité l’ennui, et dire cela, pour le coup, ça me fait mal. Parce que oui, autant pour ses précédents films je n'étais pas du tout d'accord avec cette idée que beaucoup reprochaient à Boyle comme quoi il n'était en fin de compte qu'un auteur de clips à la réalisation totalement surfaite, autant pour ce « Steve Jobs » je suis clairement en train de me demander si, à force, le pauvre Danny n'est pas en train de se rapprocher de la caricature qu'on fait de lui... Triste...