Eh non lecteur, les premiers revenants n’ont pas vu le jour sous l’emprise de George A. Romero. C’est en 1932 qu’un ancêtre a lancé la mode, et, depuis, des dizaines de suiveurs exploitent le filon. Parmi eux, ce Je suis une légende, estampillé 64, qui place Vincent Price seul dans un décor post-apocalyptique, luttant pour se défaire d’une cohue de spectres pas vraiment dégourdis. Certes, ceux-là savent encore parler ou brandir un gourdin ; mais ils craignent l’ail, les pieux, les miroirs et une pichenette du bras. Nonobstant, quand la nuit vient, ils sont tous les mêmes pantins désarticulés inondant les rues de leurs convulsions pestilentielles. Cosignataire du script, Richard Matheson, l’auteur du récit original, a désavoué cette première d’un trio d’adaptations : imaginez donc s’il avait vu celle avec Will Smith. Econome en truquages et dans sa distribution, le tandem Salkow-Ragona préfère pointer l’objectif sur l’exil forcé, l’écrasante solitude du héros, lui qui face au désastre n’est plus que défenses et souvenirs douloureux. Encastré dans la psychose ambiante en vigueur à l’époque, l’essai souffle un vent brusque, plombé, étonnamment tragique, à mille lieux du remake dynamité qui viendra près d’un demi-siècle plus tard. Lui aussi, il aurait mieux fait de ne pas revenir.