Avis sur Capitaine Mystère

Un bon film d'aventures avec un Rock Hudson fougueux en justicier, si le scénario ne nous frappe pas son originalité l'ensemble est bien rythmé et entraînant.

Douglas Sirk s'essaye au film d'aventure avec "Capitaine Mystère", même si le mélodrame n'est pas totalement écarté puisqu'il existe bien une histoire d'amour, laquelle prend une place trop mince dans une intrigue un peu trop scotchée à son côté "Robin des bois". Malgré un manque d'humour, surtout dans une dernière partie très sérieuse, il faut reconnaître la grande habileté dans la conduite du récit et l'élégance formelle à l'oeuvre avec des couleurs qui rappellent celles inondant les mélo du maître. Très classique dans son enchaînement d'actions et dans la caractérisation des personnages, le film ne prétend pas être autre chose qu'un divertissement soigné et savoureux, un plaisir pour les yeux (magnifique Technicolor) et pour les oreilles (des dialogues très bien écrits), une pièce mineure de Sirk mais pas négligeable pour autant.

Boum patatras! Moi qui était parti, sur une formidable lancée, explorer la filmographie de Douglas Sirk ("Mirage de la vie" et "Qui donc a vu ma belle?" étaient des chefs d'œuvres), voilà que je m'écroule au sol et m'étend à plat ventre sur le gravier qui m'a fait glisser. Ce gravier porte le nom de "Capitaine Mystère" et se présente comme l'un des films d'aventures réalisés par ce cher Sirk. Bon, faut dire qu'après avoir vu deux films de lui qui étaient plus qu'excellents, j'en attendais énormément de ce film. A en juger le synopsis et la jaquette du DVD, je m'attendais à un film d'aventures, drôle et nerveux, et donnant ses lettres de noblesse au genre. A mon grand regret, force est de constater que les aventures de ce "Capitaine Mystère" ne sont pas réussies. Certes, d'autres réalisateurs ont fait pire dans le genre, mais venant de Sirk, l'homme était capable de faire bien mieux. Là, on se retrouve devant un film d'aventures qui dure 1h30, mais qui semble en durer trois tant le rythme est exagérément lent. Sirk préfère immiscer sa caméra dans des scènes plutôt intimistes, qui semblent faire office de simple remplissage. Je ne sais pas si c'était un simple film de commande pour que Sirk puisse casser la croute ou si ce film provient de sa propre initiative, mais il faut croire qu'il n'était pas passionné par ce qu'il filmait. En gros, on a le droit durant une bonne heure à des petits jeux amoureux entre Rock Hudson et Barbara Rush, sous fond de révolution irlandaise, qui ne valent rien, puis enfin survient les dernières trente minutes, là ou tout est censé s'accélérer. Or, ça ne s'accélère en rien. On ne ressent rien. Le climax est raté, les scènes de suspense aussi. La seule chose que j'avais envie en faire, et j'en suis désolé vu le respect que j'ai pour Sirk, c'était de couper le film. En s'attardant sur les amours du personnage principal, Sirk oublie l'essentiel du film d'aventures, celui de faire vibrer le spectateur en plongeant ses personnages dans des situations épiques et rocambolesques. Là, j'ai eu l'impression d'avoir affaire à un film lent et bâclé, sans ressentir la moindre touche du réalisateur. J'aurais adoré pouvoir aimer "Capitaine Mystère", mais je ne vais pas me mentir à moi-même. Sirk signe ici un film pauvre et vide, dans lequel l'ennui prend vite le pas sur le spectateur, malgré des images de toute beauté.

Douglas Sirk est plus réputé pour ses poignants mélodrames que pour ses films d'aventures.
Et pourtant, Capitaine Mystère vaut le détour, ne serait-ce que pour ses couleurs chatoyantes, ses décors parfaits de l'Irlande sauvage et ses acteurs si expressifs. Rock Hudson est magnifique en robin des bois maladroit, et si le film paraît plus léger à côté de Tout ce que le ciel permet ou Écrit sur du vent, il propose une vraie réflexion sur le courage et la folie, la trahison et la sagesse.
Il est ponctué de scènes comiques (la fessée, le duel tourné en dérision...), et de scènes tragiques (la fille qui livre son père malgré elle, les trahisons ou fausses trahisons successives). On ne s'ennuie pas dans un récit mené à un rythme anormal pour un Douglas Sirk, qui de ce fait ressemble plus à un Raoul Walsh dans le traitement narratif. Mais il s'agit bel et bien d'un film de Douglas Sirk, on a l'histoire amoureuse qui encadre le récit, une utilisation symboliste de la couleur et bien évidemment le jeu des miroirs qui, tout comme chez Ophüls, révèle une mise en scène subtile fondée bien plus sur les regards furtifs et passionnés que sur les mots.

Certainement pas le meilleur film du réalisateur. Il faut attendre au moins une heure pour se passionner pour les aventures en demie teinte de ce capitaine Mystère interprété par un Rock Hudson plutôt mollasson. Plus inspiré par les films noirs, Douglas Sirk peine à reconstituer les films d'aventures.