En plus de nous laisser des grains de sable du désert australien en travers de la gorge, "The Rover" a cette capacité à faire voler en éclats le peu de foi qu'il nous reste en le devenir de l'humanité.
Dix ans après la Chute (sociétale, économique, politique, les trois ? On n'en saura pas plus), Eric (Guy Pearce) se fait voler sa voiture par trois malfrats en cavale. Guidé par une étrange obsession pour la récupérer à tout prix, il se lance à leur poursuite et fait la connaissance, en cours de route, du petit frère mentalement déficient de l'un d'eux, Rey (Robert Pattison).
"The Rover", sous couvert de western post-apocalyptique, prend la forme d'un road-movie émaillé de rencontres aléatoires avec des autochtones que le besoin de ressources a totalement déshumanisé. Dans une ambiance très contemplative enchaînant les plans sublimés par la photographie de Natasha Braier, le film suinte en permanence la rage viscérale et contenue de son personnage principal pour mieux exploser lors de courts instants de violence meurtrière.
Avec cette atmosphère lourde comme une chape de plomb, les rares lueurs d'espoir que David Michôd sème sur la route de ses deux protagonistes s'éteignent inexorablement une à une (le médecin, les aborigènes, une conversation avec un militaire au détour de laquelle un intéressant parallèle entre l'effondrement sociétale et la perte d'humanité se dessine et, enfin, même la relation entre Eric et Rey, principal éclair d'optimisme du long-métrage, ne sera pas épargnée) nous dressant un réquisitoire amer et sans concession sur l'état de l'humanité.
Alors qu'Eric finira enfin par laisser transparaître un peu d'émotion, la scène finale, magistrale, nous assènera un ultime coup imparable derrière la tête nous laissant désemparé de tristesse quant au but recherché inlassablement par le personnage.
Le pire avec "The Rover", c'est qu'on ne peut s'empêcher de penser qu'à quelques variations près, cette histoire était parfaitement transposable dans nos sociétés contemporaines. Désespérant. Mais tellement réussi.