Après la réussite et le succès retentissant de "Skyfall", le spectateur était en droit d’attendre beaucoup des nouvelles aventures du célèbre personnage créé par Ian Fleming. Pour preuve, "007 Spectre" bat tous les records du box-office dès sa sortie (il a même fait mieux que "Star Wars – Le réveil de la force", c’est dire !), avant de s’essouffler doucement, à l’instar de son scénario d’ailleurs. En dépit du fait que ce soit le même réalisateur qui a réalisé "Skyfall" et "007 Spectre", il est clair que ce nouvel opus de l’agent 007 n’est pas à la hauteur espérée malgré une mise en scène soignée. Dès l’entame, cette grande qualité nous frappe en plein visage au beau milieu de la fête des morts, à Mexico, sous une musique très à propos signée par Thomas Newman. Un début fracassant, prometteur, mais ensuite on perd les recettes qui ont fait le succès du 23ème James Bond ("Skyfall"), comme la perceptible sensibilité synonyme de relative fragilité en centrant l’intrigue davantage sur l’espion, alors présenté sous un jour plus noir, plus en prise avec lui-même, bref plus humain. La faute à une équipe de scénaristes considérablement renforcée ? Je ne saurai dire, d’autant plus que le trio de scénaristes a l’origine de "Skyfall" a rédigé aussi "007 Spectre", après s'être vu doubler l’équipe. Six gars pour rédiger un scénario, ce n’est pas un peu beaucoup ? Je ne saurai dire, et personne ne pourra répondre à cette question car il faut prendre en compte le fait que le script a été piraté, ce qui a dû considérablement changer la donne quant à l’intrigue. Ici, on retrouve James Bond revigoré mentalement, paré de son costume toujours impeccable mais qui parait un peu étroit sur les phases d’action, plus implacable et déterminé que jamais et sans grande émotion apparente, au grand dam de son nouveau directeur, interprété par Ralph Fiennes, clairement pas au niveau du charisme de Judi Dench.
Il faut dire qu’il a fort à faire, puisque son rôle a été compliqué d’un éventuel abandon du programme 00 jusqu’au possible arrêt de l’existence même du MI6.
Ce qui pêche le plus, c’est qu’on nous balance une intrigue assez complexe, évoquant à la fois "Skyfall" et "Quantum of Solace". Cette complexité nous permet de voyager, puisqu’on va d’abord, vous l’aurez compris, à Mexico, puis à Londres, Rome, et Tanger. On voyage à travers le monde, les décors sont beaux, mais on n’est pas là pour faire du tourisme : uniquement pour démanteler un réseau dénommé Spectre, dirigé de façon très convaincante par Christoph Waltz, parfait dans le rôle de ce fou à lier tant il est mégalo, cynique et dangereux, tout en étant discret. Ce comédien m’avait déjà fortement surpris dans "Inglorious Basterds". Quant à Léa Seydoux, l’expérience a dû être riche pour elle, mais je ne sais pas si c’est parce qu’elle a été intimidée par les moyens débauchés pour cette grosse production et par l’aura de Daniel Craig et de Sam Mendes, mais la petite française semble faire un peu potiche alors qu’elle est censée être la fille d’un tueur. Pire : son personnage m’a semblé plat tant il semble inexpressif. A la limite, le rôle accordé à Monica Bellucci, la splendide veuve d’un criminel répondant au doux nom de Lucia Sciarra, a bien plus de consistance (puisque c’est là que l’enquête peut se poursuivre) malgré une présence nettement plus limitée que Madeleine. En somme, pas de quoi pavoiser devant ce que je considère être une surenchère de la brutalité, voire de la bestialité. En effet, James a retrouvé le goût des femmes, mais sans aucun romantisme. Donc pour le charme, on repassera. Ce 24ème James Bond est décevant en bien des points, y compris dans la photographie, certes bonne mais moins réussie que pour "Skyfall". Il retrouve son style d’antan, c’est-à-dire un scénario pas toujours très compréhensible, des filles, des voyages à travers le monde, des gadgets, à l’exception des expressions de l’agent secret, toujours plus glacial au fur et à mesure que les années passent. On retrouve également les voitures qui me font verdir quand je vois comment elles finissent. D’ailleurs je profite de mon petit laïus pour passer un petit message au staff du film : si vous ne savez pas quoi faire des voitures, en particulier l’Aston Martin, au lieu de la jeter dans l’eau la prochaine fois, ou d’en faire je ne sais quoi d’autre encore de fâcheux, eh bien je suis preneur. Alors si par le plus pur des hasards ma demande vous venait aux oreilles… n’hésitez pas ! J’en prendrai grand soin... c’est promis ! (ah zut, j’aurai peut-être dû faire une critique plus positive, non ?). Bon, j’admets qu’en me relisant, je dresse un portrait relativement négatif de ce film qui se laisse pourtant suivre assez agréablement tout au long de ses 2h30. Il n’est pas mauvais, loin de là, mais il faut avouer qu’atteindre le sommet est une chose, y rester en est une autre. Sam Mendes n’y est pas parvenu sur ce coup-là. J’aurai été quand même curieux de savoir ce que ça aurait donné si le script originel n’avait pas été piraté, mais ça… on ne le saura jamais.