La Nourrice est donc un film d'émancipation, soit. Rien de surprenant, la mise en scène parfaite que Bellochio maîtrise si subtilement créee ici quelque chose de désespérément classique qui peut paraître insignifiant. Le scénario semble être linéaire et Bellochio joue alors sur la place de ses personnages dans leur décors. La Nourrice, pauvre dans un cadre bourgeois, fait face à la Mère, etouffée par les obligations prosaïques de la maternité (la pire des conventions ???) la aussi se dessine un cadre de contraintes, un décor différent, celui d'une profonde affliction). A l'extérieure de cet appartement, c'est l'asile blanc et son jardin aux arbres duquel, suspendues comme des cloches, les démentes jouent au devant des médecins, eux même étrangers, comme les représentent Bellochio, à leur propres charges. La Mère s'éloigne (et le cinéaste a du mal à ne pas faire de cette figure un repoussoir, en rejoignant le salon au portrait des impuissants du cinéaste), La Nourrice reste et nourrit l'enfant et le médecin lui apprend à écrire la réponse aux lettres d'un instituteur, émeutier, prisonnier politique, père de l'enfant délaissé de cette Nourrice. Les deux figures féminines peuvent rapidement se rapporter à la symbolique du récit. La Nourrice s'émancipe par l'instruction, comme le peuple séditieux à l'écoute du discours libertaire, tandis que la femme bourgeoise s'émancipe de son rôle de Mére, intrinsèquement par la portée du même discours. Mais le rapport de subordination qui demeure, lui reste inchangé, et c'est au fond devant ce constat que Bellochio laisse indiciblement, un lien ténu unir deux destins contradictoires, l'espoir présent, en germe c'est que la Nourrice libérée de sa condition puisse elle aussi se refuser à la maternité, tandis que la question du choix ne devrait plus se poser en terme d'impuissance psychique mais comme libre inclination de la nature de chacun. C'est toute à une réflexion sur la destinée féminine, et sur la question du choix que la Balia invite, je le pense très fort.