Des hommes et des femmes, nés dans l'entre-deux-guerres, ils n'ont aucun point commun sinon d'être homosexuels et d'avoir choisi de le vivre au grand jour, à une époque où la société les rejetait. Ils ont aimé, lutté, désiré, fait l'amour. Aujourd'hui, ils racontent ce que fut cette vie insoumise, partagée entre la volonté de rester des gens comme les autres et l'obligation de s'inventer une liberté pour s'épanouir. Ils n'ont eu peur de rien...
Le cinéma de Sébastien Lifshitz est sculpté par la grâce, « Les Corps ouverts » (1998), « Les Terres froides » (1999), « Presque rien » (2000), « La Traversée » (2001), « Wild Side » (2004), « Plein sud » (2009), où l’humain, souvent, est déterminé par ses actions. Ce cinéma sensible, qui naturalise les intentionnalités et leurs conséquences, dans « Les Invisibles », rend immortels ces témoins du 20e siècle qui évoquent, souvenirs parfois idéalisés, les combats passés, FHAR, GLH, EUEH, MLF, Gouines Rouges, accompagnés d’archives passionnantes. Les cadres, le lyrisme, les bruitages, emmenés par la main d’un maître, du visible de la question, nous font basculer progressivement vers sa zone invisible, homogénèse, génération d’êtres semblables à nous. Ces « Invisibles », donc, sortis très tôt du placard, pionniers pour certains des luttes pour les droits, d’autres, témoins sincères d’une homosexualité rurale, nous disent l’accomplissement d’une vie, grand œuvre/petits actes, des souvenirs triviaux, ce qui reste quand on va tout oublier. Pour éprouver, nous, presque rien, l’émerveillement. (Hervé Joseph Lebrun, « Chéries-Chéris 2012 »)