A chaque sorti d'un nouveau Woody Allen, on retrouve la même discussion : comment est le nouveau Woody Allen de cette année ? Réalisera t-il un grand film encore ou a t-il abandonné et ne cherche plus qu'à sortir des petits films sympathiques (ses sorties, une par an, bien réglées, seraient là pour le prouver) ?
Je trouve qu'il y a une part de snobisme incroyable à critiquer le cinéma de Woody Allen. Je ne parle pas d'un film en particulier, mais son cinéma. Ca me dépasse un peu qu'on puisse aujourd'hui remettre en question l'oeuvre d'un des plus grands réalisateurs contemporains, qui a réalisé pas mal de très grands films (certes, avec des films beaucoup plus mauvais dans le lot, mais d'autres réalisateurs sont dans ce même cas de figure, comme Lumet par exemple) et qui surtout a tissé un genre bien à lui, si bien que d'un côté, on a parfois l'impression que plusieurs des films de Woody Allen se ressemblent, mais d'un autre nul autre que lui ne sait faire ce genre de film, et lorsqu'il viendra à disparaître, il manquera au cinéma. Car rappelons le une bonne fois pour toute. Aujourd'hui, c'est peut-être l'un des meilleurs (si ce n'est le meilleur) dialoguiste qui soit. Je ne pense pas, contrairement à certains, que Woody Allen abandonne la mise en scène au profit d'une écriture (qui serait trop appuyée chez certains). A mon avis, chez Woody Allen la parole et comment la filmer est toujours un défi de mise en scène avec, dans Blue Jasmine, une fixation permanente sur le personnage de Jasmine qui est toujours au centre de son intérêt, au centre de la scène, au centre de ce qu'il se passe. Ce n'est pas une vision réaliste que nous propose Woody, sous sa caméra, mais bien celle du monde de Jasmine. Woody Allen dresse le portrait d'une femme, beaucoup plus sombre et beaucoup moins humoristique qu'à ses habitudes. Un film noir, maîtrisé de bout en bout, qui certes, n'est pas le meilleur du réalisateur, mais qui ne peut que confirmer, une fois de plus, que le metteur en scène new yorkais, n'a pas perdu la main, et qu'il est encore aujourd'hui un réalisateur d'une fougue et d'une modernité surprenante.