Dans un genre purement fictif, En solitaire, de Christophe Offenstein n’est pas une panacée. Le film prend de la valeur du fait d’un tournage en milieu maritime, non en bassin, et d’un certain soin apporté à faire vivre le Vendée Globe comme si l’on y était. Huis clos marin pour le moins documenté qui finit malheureusement dans une certaine confusion. La bonne morale finira par entériner un peu le propos du réalisateur, et ce malgré toutes ses bonnes intentions. Si l’on admire François Cluzet pour son implication physique, si l’on reste captivé par le décor unique de ce bateau léger aux allures sportives, l’on discerne très vite le souffle court dont le récit est indéniablement doté, malgré l’idée relativement bonne de départ.
Voilà qu’un passager clandestin grimpe à bord du bateau de l’un des concurrents du Vendée Globe. Des Îles Canaries à la France, en passant par le Cap Horn, soit le tour du monde, un marin confirmé et un exilé mauritanien devront cohabiter sur le voilier épuré, dans le froid, la tempête et la solitude. La particularité supplémentaire tenant du fait que le passager surprise ne doit pas être découvert par l’organisation de la course. Bref, amplement de quoi tenir en alerte un public relativement conquis par une aventure humaine aux enjeux multiples. Malheureusement, comme l’on pouvait s’y attendre, le concurrent choisira l’humanité en dépit de la gloire, s’attachant malgré ses airs bourrus à son compagnon de route, d’abord un boulet puis atout pour son tour du monde.
Le cinéma hexagonal se voulant trop souvent niais dans son propos social, il était incontestable que la fin du récit tuerait dans l’œuf l’espoir de découvrir un film aussi puissant qu’il aurait pu, dû, l’être. Pour autant, l’aventure maritime que nous offre Christophe Offenstein est agréable, très bien filmée, physique et tourmentée. L’ennui n’est dès lors jamais de mise, malgré un concept casse-gueule. Comme mentionné plus haut, le succès du film dépanadait presque exclusivement de l’implication du comédien qu’est Cluzet. Celui-ci semble alors très à l’aise dans la peau d’un marin solitaire, compétiteur dans l’âme et père de famille à qui l’on ne tient pas rigueur de son absence. En effet, sa croisade personnelle sur les eaux du globe est une fierté pour toute sa petite famille, conjointe, fille et beau-frère. Notons que toujours en contact avec son pays, sa famille, le film d’Offenstein offre un placement de produit pour le moins détonant à la communication via Skype. Mais comment en aurait-il été autrement?
L’on se délectera alors des magnifiques séquences de navigation, des prises de vues immersives du directeur de la photographie. Conscient du défi qu’à pu représenter un tel tournage, inutile de casser impunément du sucre sur la réalisation et l’écriture du film, malgré cette fin niaise qui assombri le tableau. Si je n’ai en aucun cas été transcender par le film en lui-même, j’avoue tout de même avoir été agréablement surpris par un film qui avait comme concurrence directe, en 2013, le formidable, selon la critique, All is Lost, de J.C. Chandor. Lors qu’ils s’appliquent, les cinéastes français semblent avoir encore de beaux restes. Espérons que Christophe Offenstein aura montré la voie, même si bien des erreurs doivent être corrigées. 12/20