Êtes-vous familier avec le torture porn ? Comme son nom l'indique, il se déleste du maximum d'éléments scénaristiques pour faire couler le sang (à la différence de son cousin le porno qui lui...euh fait couler autre chose). Tout est prétexte à caillasser, brutaliser, tronçonner, démembrer, énucléer et ainsi de suite. Depuis une bonne décennie, les grosses productions ont également leur déclinaison avec le destruction porn. Grossièrement, vous remplacez les corps mutilés par des quartiers, immeubles, villes, pays, planètes et vous avez saisi l'idée. Le point commun ? On essaie souvent de les faire passer pour du cinéma, alors qu'ils sont incapables d'en utiliser les forces motrices. Je commence par ce point car à mon sens, Gareth Evans a presque inventé son propre genre : le violence porn.
Je l'avoue, je n'aime pas particulièrement The Raid. Il aurait tout à fait pu devenir un petit classique du cinéma d'action s'il avait pu travailler un minimum son histoire ou ses personnages. Bref, ce qui permet de lancer et faire rebondir l'intrigue, de susciter des émotions comme l'empathie. Et évidemment accepter des notes de légèreté pour accréditer un univers où toute forme de crédibilité est à jeter par la fenêtre. Parce que sans ça, vous n'aurez qu'une coquille vide et plus vous tenterez d'en masquer la vacuité avec de l'action plus elle sautera aux yeux. Basique ? Au-delà du basique. "Mais c'est le concept ! " ? Mais quel concept de film exige que vous ôtiez toute dimension narrative, affective ou même vaguement logique ? J'ai beau chercher, à part le porno je ne vois pas. Sauf qu'ici, ce sont les os qu'on défonce.
The Raid 2 a semble-t-il pris acte de certaines doléances adressées à l'issue du premier volet. D'où quelques efforts consentis pour raconter quelque chose. À peine échappé de la tour dans laquelle il s'est confronté à une cinquantaine d'ennemis armés jusqu'aux dents, le super-super flic Rama doit infiltrer le camp des super-méchants mafieux. Problème, les super-méchants mafieux sont sur le pied de guerre avec un autre super-méchant mafieux. Oh la la, ça sent bon la super-mouise. Vous l'avez compris, ça donne l'impression d'être plus écrit mais c'est peut-être encore plus stupide que le premier, c'est dire...Gareth Evans est au scénario, sauf qu'il est encore moins subtil au stylo que derrière la caméra. Aucun manque de respect ici, l'action est globalement lisible, certaines chorégraphies fonctionnent (surtout au début et à la fin) mais le tout est d'une lourdeur effroyable. Si on se contente de la forme, on voit surtout une reprise de l'esthétisme tapageur à la Nicolas Winding Refn. Ce qui irrite d'autant plus que les personnages et enjeux sont traités comme de vulgaires hochets qu'on agite pour mieux jeter l'instant d'après. Si quelqu'un peut me dire à quoi sert le combattant vagabond, merci de me le faire savoir. Je ne parlerai même pas des "rebondissements" qui sont aussi gros et idiots les uns que les autres. 150 minutes d'orgie sanguinolente entre décérébrés, c'est très long.
Encore une fois, pourquoi ce sérieux papal alors que l'écriture et les protagonistes/fonctions semblent évadés des plus gros nanars ? En assumant une dimension ouvertement délirante, le film aurait pu être réussi. Surtout qu'en termes de pure bêtise, on met la barre très haut chez The Raid. Je veux bien accepter de me détacher complètement de toutes considérations d'ordre narrative, mais dans ce cas que reste-t-il ? De la violence-porn. C'est bien là le problème.