Dernier opus du Maître, ultime coup de génie, en tout points de vue. Il est pour ma part mon Kubrick préféré (même si 2001 est son plus grand chef d'oeuvre) et aussi un de mes films fétiches. Cette fois-ci, c'est bien la quatrième fois que je le vois. Alors qu'en dire ?
Kubrick adapte le roman "Traumonvelle" d'Arthur Schnitzler, un livre de 1926 et évidemment y met sa patte de génie, bouleverse les genres, les codes et choque le public à sa sortie.
Véritable exploration intimiste, mystique et psychologique d'un couple en soif de désir et d'adultère, Eyes Wide Shut est un film fascinant et, bien qu'il soit déconseillé aux âmes sensibles, vous marquera à jamais.
Bill Harford est un éminent médecin new yorkais, brillant, jeune, attirant et riche. Il forme avec sa femme Alice le couple modèle. Mais quand cette dernière va lui révéler ses fantasmes d'adultère, Bill s'en voit si troublé que, lui aussi à son tour tenté par le désir, va errer dans un New York étrange, qui le conduira à une cérémonie sectaire onirique, à la fois fascinante et repoussante où il verra son destin, en quelque sorte, se sceller. Le film est l'exploration de cette errance, de cette recherche, du trouble originel de Bill, incarné par un Tom Cruise absolument magistral.
Kubrick livre donc une analyse d'une finesse incroyable de la tentation, de la soif de désir chez l'homme et la femme, contre lequel ils ne peuvent rien. Le désir est dangereux, le désir est fascinant, nous dit Kubrick, mais jusqu'où aller dans l'exploration des plaisirs ? Il nous le montre génialement dans cette jungle new yorkaise uniquement basée sur le sexe où se mêle orgies, prostituées et femmes en déroute cherchant du réconfort.
Mais Eyes Wide Shut est aussi le récit d'un couple en déroute qui, comme un radeau sur les eaux déchaînées, doit survivre. Il nous montre les épreuves que l'on doit surmonter pour le vivre ensemble...
Et Kubrick pour sa dernière scène du dernier film de sa vie, finit dans un magasin de jouet. Sublime ironie tragique... L'homme n'est qu'un enfant qui joue avec des jouets plus gros, mais en réalité rien ne change vraiment. Je ne spoilerai pas la réplique finale qui résume à elle seule le génie kubrickien, libérateur, artistique et finalement, profondément humain.
Après bien évidemment, c'est du Kubrick donc musique sublime, donc mise en scène exceptionnelle, donc séquences inoubliables (les plans des convives masqués !). Il faut à tout prix voir Eyes Wide Shut, vivre cette expérience une fois dans sa vie.