Yeuk Saat est un thriller aux tendances érotiques voyeuristes typiquement asiatique, qui se heurte violemment à son sujet, dans un style sans concession assez rare dans nos contrées. On aime ou on n’aime pas.En tout cas le casting est assez inégal. D’un côté on a une héroïne, Lily Chung, qui s’avère tout à fait pertinente, quoique peut-être un peu fade, au moins dans la première partie du film. Elle joue sans excès, avec conviction et réalisme son personnage auquel elle confère en plus, et ce n’est pas négligeable, charme et prestance. En face le tueur (je ne dirai pas son nom même si c’est une évidence), est en surjeu total. C’est l’exact opposé de Chung. Complétement en roue libre, l’acteur en rajoute une double couche dans le style gros pervers qui ne peut plus se contenir quand il voit du rouge ! Honnêtement, même si parfois cela donne de l’intensité, là il est tout de même beaucoup trop lourd, virant plus d’une fois à la caricature. C’est le cas aussi de plusieurs seconds rôles, notamment les fous (ben oui, le film a pas mal de fous). Là, à part celle qui sera notre deuxième héroïne, et qui joue pas mal, les autres c’est le freestyle total.Le scénario a des défauts et des atouts. Parmi les atouts figure un rythme très efficace, un coté brut et direct qui fait plaisir, un dénouement à la hauteur. Parmi les points faibles figure clairement un gros manque de suspens. Pourquoi nous cacher le tueur dans la première scène pour nous assener aussi lourdement son identité dans la scène suivante ?! Le film a aussi un peu de mal à exploiter l’arrière-plan qu’il utilise, à savoir ce centre d’aide aux déficients mentaux. Pourquoi placer son action dans un tel lieu si c’est finalement pour le délaisser ? Mais bon, ça tient quand même.La réalisation est très efficace, mais il faudra indéniablement aimer le style de Tang. Sa mise en scène à d’indéniables tendances racoleuses, que j’ai trouvé personnellement pertinente vu le sujet, mais qui pourra rebuter. C’est solidement fait, avec des meurtres réussis (le premier est assez anthologique tout de même), et un travail froid qui colle bien à l’ambiance. Cette dernière est l’élément dominant du film. Yeuk Saat a une sublime atmosphère glaciale, avec des décors très sobres, dépouillés, des murs gris et blanc, des escaliers en métal, des sous-sols, sur lesquels une photographie aux petits oignons agit à merveille. Le travail sur les couleurs froides et les éclairages nocturnes est juste magnifique. Les meurtres n’ont rien de vraiment sanglant, sauf le dernier un peu gore mais enfin, c’est tout de même ténu, en revanche ils ont un coté malsain certain. Les viols sont impressionnants et pourtant assez suggestifs finalement, aussi clairement seul un public prévenu doit se lancer dans le visionnage. La musique est omniprésente et insiste encore sur cette ambiance froide et inquiétante, donné par l’image.Au final Tang réalise un métrage très singulier, dominé par une réelle violence, et en même temps porté par une esthétique et une ambiance parfaite. Je pourrai rapprocher ce film de Washing Machine, dont ce film a les mêmes qualités, mais en étant plus intense dans son rythme, mieux structuré que le métrage de d’Amato. Il vaut le coup d’œil pour celui qui trouvera le film et ne sera pas rebuté, car il a de vrais atouts.