Emporte t-on son talent à la semelle de ses souliers? Hélas, le dernier opus d'Asqhar Farhadi nous démontre le contraire. Car on ne retrouve pas grand chose du formidable réalisateur d'Une séparation dans ce qui frôle par moments le nanar pathétique....
Golshifteh Farahani vous manquait? Comme on vous comprend, cher Asqhar. Qui voudrait échanger un baril de Golshifteh contre deux barils de Bérénice...
Vous connaissez tous le scénar, tellement on en a parlé. Ahmad (Ali Mosaffa, qui a perpétuellement l'air d'avoir un balais dans le cul), iranien, vient à Paris pour finaliser son divorce avec Marie (Bérénice Béjo). Celle ci, enceinte, veut en effet se marier avec le futur père, Samir, qui gère la teinturerie du quartier. Petit problème: Samir est déja marié, et sa femme est dans le coma. Notre don Juan, c'est le bovin Tahar Rahim, remarquablement inexpressif; il faut dire qu'on lui a écrit un dialogue particulièrement indigent.
Bizarrement, Marie n'a pas retenu l'hôtel demandé par Ahmad; elle préfère le loger chez elle, alors qu'elle héberge déja Samir et son fils, le petit Fouad (Elyes Aguis), enfant qui semble assez perturbé. [On a dit au jeune acteur: faut que tu aies l'air malheureux et buté -il arbore d'un bout à l'autre du film la même mimique. Malheureux et buté....] Marie veut elle montrer à Ahmad quel bordel est devenue sa vie, en raison en particulier de l'hostilité que lui témoigne sa fille ainée Lucie (Pauline Burlet)? [On a dit à la jeune actrice: faut que tu aies l'air malheureuse et révoltée -elle arbore d'un bout à l'autre du film la même mimique. Malheureuse et révoltée....]
Céline, l'épouse de Samir, a t-elle voulu se suicider parce qu'elle était dépressive, parce qu'une robe a été tachée (et par qui) à la teinturerie, ou bien a t-elle eu connaissance de la liaison de son époux? Et si oui, qui lui a fait suivre les mails amoureux échangés avec Marie? Lucie, l'employée au noir de la teinturerie, le Pape, le père Noël? Pendant deux heures (car le truc est interminable) ça pleure, ça braille, les portes claquent.....tandis que notre intérêt ne cesse de faiblir. Jusqu'à la dernière scène, au chevet de Céline, limite grotesque.
Bon, j'imagine que pour Farhadi, le personnage de Marie est hautement exotique: une femme qui a eu deux filles de deux hommes différents, s'est marié avec un troisième, et divorce pour en épouser un quatrième lui même marié, c'est sacrément folklo par rapport aux prudes iraniennes. Ou alors: autre hypothèse: Farhadi était payé par Ahmadinedjab pour montrer combien les femmes occidentales sont peu recommandables? Combien la France est à fuir? Ce qui expliquerait qu'il ait situé son action dans l'endroit le plus moche possible: un pavillon foutraque dans la banlieue nord, collé aux voies de RER. J'rigole!
Reste Bérénice Béjo, qui a eu récemment je ne sais plus quel prix. Elle n'est pas mal -mais elle est totalement incapable de donner à son personnage ce petit plus qui l'humaniserait, qui donnerait envie de s'y intéresser. Hélas, on ne voit qu'une bovary de banlieue, hystérique sur les bords.
Plaisanterie mise à part, c'est une grosse déception. Si vous avez adoré "A propos d'Elly", passez votre chemin, vous vous feriez trop de mal.....