Premier film de George Miller et, accessoirement, film culte et fondateur d’une saga à part dans l’histoire du cinéma, "Mad Max" est, près de 40 ans après sa sortie, un véritable ovni… dont il faut bien admettre qu’il peine à dissimuler les ravages du temps et, surtout, son budget ultra-serré. Le spectateur d’aujourd’hui aura, ainsi, un peu de mal à faire l’effort d’abstraction nécessaire pour lui faire oublier la qualité discutable de l’image et le manque de moyens frappant des décors et des costumes. Pour autant, là où d’autres premiers films souffraient des mêmes défauts et de bien d’autres (voir le premier "Evil Dead" de Sam Raimi ou le "Bad Taste" de Peter Jackson), "Mad Max" bénéficie d’atouts qui lui ont permis de mieux traverser les années et de présenter, aujourd’hui encore, un spectacle surprenant. Tout d’abord, l’univers proposé est plutôt intéressant puisqu’il part d’un postulat de départ apocalyptique, sur fond de guerre du pétrole et de révolte du peuple, pour dresser le portrait d’une nouvelle société terrorisée par les gangs des routes. L’originalité de ce premier opus est que la civilisation, telle qu’on la connaît, est encore très présente (habitations modernes, routes bitumées, commerces, tribunaux...)… ce qui ne sera plus le cas dans les opus suivants, bien plus post-apocalyptiques. Ce parti-pris s’explique, sans doute, par le budget du film mais confère un caractère très atypique au film qui n’est pas sans charme. L’intrigue n’est pas mal non plus, même si elle reste assez prévisible
(à l’exception, peut-être du sort réservé à la famille du héros).
et qu'elle ne fait pas l'économie de quelques poncifs éculés (les méchants motards qui veulent tuer le gentil policier, l'histoire d'amour en milieu champêtre...). Mais, s’il ne fallait retenir qu’une chose de ce "Mad Max", c’est la naissance d’un monstre de cinéma : Mel Gibson. On ne dira jamais assez à quel point l’acteur est une bête de charisme et le film (qui marque sa première véritable apparition en haut de l’affiche) le confirme aisément. Mel Gibson bouffe, donc, littéralement l’écran et transcende le personnage de Max qui, malgré un look pas vilain, reste assez "basique" sur le papier et aurait pu paraître, à l’écran, assez insignifiant. L'interprétation de l'acteur éclipse, d’ailleurs, totalement ses partenaires de jeu. A peine retient-on les prestations de Tim Burns en Johnny Boy fêlé (mais caricatural) et Hugh Keays-Byrne en chef de gang outrageusement cabotin. "Mad Max" peut, enfin, compter sur ce qui a fait la légende de la saga (et qui sont, à chaque fois, les meilleurs moments du film), à savoir ses courses poursuites et ses cascades en tout genre, ainsi que ses incroyables véhicules. La force de Miller n’est pas tant de mettre en scène des cascades mais de les rendre incroyablement crédibles et, de ce fait, terriblement spectaculaires sans pour, autant, être outrancières. On en oublierait presque certains effets, bien plus outranciers eux
(voir, par exemple, le plan un peu ridicule sur les yeux exorbités du méchant Toecutter).
"Mad Max" reste, donc, comme un film ambitieux et plein de promesses, qui a marqué la naissance d’une star malgré un budget light. La suite qui bénéficiera de moyens biens supérieurs) montrera que les espoirs placés dans le film n’étaient pas vains…