Jusqu'à présent, c'est quasiment "les yeux fermés", si l'on peut dire, qu'on se dirigeait vers tout nouveau film de Lucas Belvaux. "Pas son genre" va peut-être modifier un peu la donne. Non pas que ce film soit mauvais, mais il est quand même un peu trop mollasson dans sa réalisation, avec des scènes souvent trop longues et d'autres, celles de karaoké, BEAUCOUP trop longues. Dommage, car le sujet du film, adaptation du roman homonyme de Philippe Vilain, est très intéressant : que peut donner une histoire d'amour entre un intello, prof de philo et écrivain, spécialiste de philosophie germanique et une coiffeuse d'Arras, fan de karaoké, de Jennifer Aniston et des romans d'Anna Gavalda ? Pour traiter ce sujet, il y avait un grand nombre de choix possibles : l'homme pouvait être quelqu'un de sincère dans ses relations amoureuses, ou ne pas l'être ; la femme pouvait être une véritable bécasse ou bien quelqu'un d'intelligent tout n'ayant pas fait de grandes études, tout en n'ayant pas une grande culture. Si l'on met de côté le choix inverse d'une histoire d'amour entre une femme intello et un homme "brut de décoffrage" ou le choix d'une histoire d'amour homosexuelle, cela nous donne quand même déjà 4 possibilités, toutes aussi intéressantes à traiter l'une que l'autre. Le choix de "Pas son genre" : dès le début, on sait que Clément, l'intello, ne croit pas à l'amour et qu'il manque donc de sincérité dans ses relations amoureuses. En plus, c'est un de ces parisiens indécrottables pour qui il ne se passe rien d'intéressant dès que le périphérique est franchi. Voilà qui ne peut que compliquer l'histoire d'amour ! Quant à Jennifer, sa culture est limitée mais, finalement, elle s'avère aussi philosophe que Clément, sauf que sa philosophie à elle n'a rien de théorique : elle vient du ressenti, elle vient du cœur et non de ses lectures. Voilà qui, au contraire, pourrait faciliter l'histoire d'amour ! A condition, bien sûr, que Clément soit capable de s'en apercevoir ! Vous voyez : il y a de quoi faire sur un tel sujet, d'autant plus qu'Emilie Dequenne excelle d'un bout à l'autre du film à traduire tous les états d'âme de Jennifer. A côté d'elle, Loïc Corbery apparait bien fade, mais le comédien n'y est pour rien, c'est le rôle qui veut ça ! Résultat : on regrette d'autant plus que la réalisation du film ne soit pas à la hauteur du sujet. Sinon, il y a une question que j'aimerais poser à Lucas Belvaux : pourquoi, lorsque la mère de Clément demande à son mari, à propos du musicien contemporain Pascal Dusapin, de donner la liste de ses compositeurs préférés, la réponse ne contient que des musiciens français ou "culturellement" français (Honegger) ?