"Pas son genre" a l'art et la manière de nous charmer, voire de nous ensorceler complètement et ceci rien que par le jeu d'Emilie Dequenne, terriblement présente, authentique et vivante et celui également de Loïc Corbery, lunaire et rêveur !
Et pourtant ce titre à l'apparence limitée, cache bien son jeu car au delà des deux acteurs et de leur interprétation franchement étonnante, se dissimule un film attachant, profond et d'une intelligence bien trop rare...
Car cette relation entre deux êtres que tout oppose, qui aurait pu rester basée sur des stéréotypes et y surfer simplement, commence en effet par installer des clichés bien ancrés pour ainsi mieux les dépasser et s'en débarrasser au fur et à mesure de l'histoire...
C'est ainsi que Jennifer tout en goûtant le bonheur du temps présent en croquant la vie à pleine dent, va déstabiliser Clément en le mettant face aux contradictions de ses certitudes, de son déterminisme de classe et de son éducation, car elle-aussi a son mot à dire sur ce qu'elle ressent face à l'œuvre de Zola, et que reconnaît finalement le prof de philo...
Car la coiffeuse Jennifer, sait de quoi elle parle et sait ce qu'elle a à dire envers et contre tout, en le faisant d'ailleurs très bien !
À ce propos, l'écriture des dialogues est d'une recherche et d'une richesse peu courante pour qu'on s'en régale avec un grand plaisir...
Er de plus, l'étude des sentiments et des attentes respectives de chacun est fort bien démontrée avec tout ce décalage qui les accompagne !
L'attente du Prince Charmant, du partage et bien sûr de l'Amour pour Émilie et le refus de se prononcer et de s'engager pour Clément qui s'interdit tout projet, par peur, par lâcheté, par crainte de casser son image de marque !
Que de moments révélateurs d'un malaise, d'une incompréhension totale entre Jennifer qui a soif d'être reconnue et aimée pour ce qu'elle est, pour ce qu'elle représente, et Clément qui lui s'enferme, se contient et accumule erreur sur erreur...
Et pourtant l'amour est bien là des deux côtés et ne demande qu'à vibrer chez tous les deux !
On sourit, on rit, on s'émeut de la naissance de cette liaison dont l'étude est d'une justesse et d'une finesse incroyable tant le caractère, les idées de nos deux amoureux forment apparemment un obstacle, sans en être réellement un sur le fond !
On suit donc avec bonheur ce couple à travers les difficultés, les doutes, les différences qui les attirent et les séparent à la fois !
Petit bémol cependant quant à certains jugements de valeur injustifiés, qu'il aurait été judicieux d'éviter comme par exemple, la ville d'Arras et l'auteure Anna Gavalda, bien égratignées et stigmatisées inutilement, alors que d'autres solutions étaient tout à fait envisageables !
Du très beau cinéma que nous offre là Lucas Belvaux, dont on sort ému et véritablement chamboulé !
Emilie Dequenne lumineuse et vraie, irradie littéralement !