Après l'excellent "Dans la cour" de Pierre Salvaldori, est sorti la semaine suivante "Pas son genre", un film dont j'esperais beaucoup en regard de son sujet et de son metteur en scène (bien que j'avais été déçu par son précédent long 38 témoins sonnait parfois faux, et qui ne m'a pas déçu du tout, bien au contraire.
Car "Pas son genre" est avant tout une magnifique histoire d’amour, un genre certainement vu et revu au cinéma (enfin c'est les autres qui s'en plaignent),, mais dont, personnellement, je ne me lasse jamais surtout lorsque les cinéastes, comme l'a fait aussi Spike Jonze dans son "Her" ou Kechiche dans "sa vie d'Adèle", arrivent à apporter à ce genre aussi vieux que le cinéma un regard original et singulier sur cette rencontre entre deux êtres qui n'étaient pas forcément destinés.
Ainsi, face àux arguments de ma propre mère qui se refuse à aller voir ce film,pourtant défendu par toutes les critiques (qu'elle a tendance à suivre autant que moi), au motif que l'histoire est la copie conforme de la Dentellière (adaptation d'un roman de Pascal Lainé "La dentellière"] portée à l'écran par Claude Goretta avec Isabelle Hupert qui voyait aussi une jeune coiffeuse d'origine modeste tomber amoreux d'un professeur plus aisé socialement, je lui ai rétorqué que le film de Claude Goretta est de 1978, et que s'il a fallu attendre 35 ans pour voir une histoire similaire, c'est quand même que la question d'une relation entre deux êtres a priori complètement opposés n'est pas si traitée que cela au cinéma, et en tout cas pratiquement jamais avec la même sensibilité que ne le fait Lucas Belvaux dans son nouveau film.
Car un des immenses mérites du scénario de "Pas son genre", c'est qu'il décrit ainsi en prenant son temps et sans jamais prendre de haut ses personnages cette tentative de relation entre ces deux êtres que tout oppose ; condition sociale, niveau culturel, le lieu géographique, l'éducation, les plaisirs de la vie, et dont la relation va peu à peu tenter de se transformer en une relation tendre et amoureuse et où les deux pourraient y trouver leur compte. Les sentiments y sont explorés dans toutes leurs composantes, culturelles évidemment, mais aussi sexuelles ( à noter les très belles scènes d’amours sans aucune vulgarité ni voyeurisme aucun).
"Pas son genre" nous démontre de très belle façon à quel point l'amour et la passion sont de belles utopies qui, comme toutes les utopies, n'ont d'autre choix que de se briser face à la réalité sociale. La joie de vivre et l'insouciance de la belle provinciale face à l'arrogance inconsciente et la culture littéraire de l'autre nous entraineront forcément, sans spoiler la fin, dans une voie sans issue, au grand regret du spectateur (en tout cas du mien) qui aurait aimé croire à l'issue heureuse de cette histoire aussi chimérique soit elle.
On sait énormément gré à Lucas Belvaux de briser les a priori des deux milieux sociaux qu'il décrit, grâce à des dialogues sont très bien écrits qui mélangent avec grande pertinence le vocabulaire populaire avec celui d’une classe plus instruite, bien loin des caricatures ( si présentes dans les comédies françaises dont j'ai parlé au début de billet). Brisant les représentations inhérentes à leurs deux milieux, Lucas Belvaux prend surtout soin d'aimer terriblement ses personnages, et de nous les présenter avec énormément de bienvaillance dans le regard.
Car, empêtrés pourtant l'un et l'autre dans leurs conventions et leurs reflexes liées à leurs statut social respectif, ce couple improbable suscite ainsi la sympathie et l'empathie des deux côtés, ce qui constitue assurément la force des très grands films (et le livre de Philippe Vilain que je n'ai pas lu, dont le film est tiré, était visiblement un poil plus condescendant sur ses personnages)....suite de la chronique sur baz-art