Le fait que le chanteur de jazz soi le premier film parlant de l'histoire du 7e art est un solide prétexte pour ne pas passer à côté, et après sa vision, je dois avouer qu'il soit une date pour le cinéma m'importe peu : c'est avant tout un film sublime. Déjà je ne suis pas un grand habitué des films muets, pardonnez donc mes réactions enthousiastes de novices à ce sujet qui vont suivre. En effet le seul dialogue du film dure à peine une minute et que tout l'aspect innovation sonore technique se situe dans les chants. La musique est bien sûr son point fort, dès l'ouverture elle anime l'écran de joie et de vie, et sa qualité m'a franchement plu. Ensuite arrivent les premières scènes, simples mais ô combien touchantes, les mimiques des acteurs étant super émouvantes, de la femme du chantre se tamponnant les yeux au regard sournois mais sympathique de Yudelson le voisin qui les aide. L'histoire est celle d'une quête initiatique qui est posée avec une simplicité débordante d’honnêteté, et qui s'affine au fur et à mesure que progresse la carrière de Jackie, pour se terminer sur une épreuve des plus difficile qui lui demande de choisir entre son avenir et le pardon de son père. Ce questionnement nous tiraille à nous aussi, spectateur, sur ce que nous aurions fait à sa place, car si la conclusion est positive, c'est que du point de vue du réalisateur le bon choix est là : pour moi le raisonnement est qu'il faut s'interroger si on ne va pas se morfondre le restant de nos jours à cause d'un acte qu'on regrettera à jamais (celui de laisser son propre père mourir afin de saisir la chance de notre vie) malgré un destin orienté vers la reconnaissance et le succès. Le choix de Jack est moral, si il loupe une étape décisive de sa carrière, il pourra toujours le retenter de se relever (avec un talent comme le sien, il devrait y arriver), et des regrets de ce genre ne peuvent en rien égaler ceux du à l'abandon de son père. Ce final est mené avec rapidité et la tension dramatique monte en flèche. On savourera d'autant plus la dernière chanson du film et « l'exit » en musique. Ces chansons de jazz qui jalonnent ce long métrage sont interprétés à merveille par Alan Crossland, qui m'a enchanté alors que je suis un inculte du jazz. Cet homme est tout aussi génial en tant qu'acteur, tout comme les autres, mais c'est aussi le réalisateur. Il livre des images d'une plastique noir et blanc vraiment somptueuse, avec des reflets lumineux magnifiques et de nombreux détails, c'est peut-être aussi la qualité de la restauration qui y est pour quelque chose, mais là j'étais aux anges...On pourrait qualifier ce film de trop simpliste ou trop basique, moi j'y vois une œuvre remplie de bonté et diffusant de l'entrain à pleine puissance, un sacré stimulant contre les esprits bornés qui nous posent des problèmes lorsqu'on les rencontre (le message pourrait bien s'étendre au racisme), et un joli morceau de plaisir musical !