Grand amateur de films de fantômes, c'est donc tout naturellement que je me suis précipité à l'avant première de The Conjuring : les dossiers Warren, du réalisateur James Wan qui est auteur d'un autre film de fantômes très réussi, Insidious, ainsi que le film d'horreur culte Saw (seulement le 1), ainsi que Death Silence (histoire de possession d'une poupée par un ventriloque mort) et Death Sentence (qui raconte la vengeance d'un père de famille contre l'homme qui a tué son fils). Je n'ai pas vu ces deux derniers, mais je n'ai guère aimé Saw malgré son efficacité (je ne suis pas très film d'horreur à la base). De Wan je n'ai apprécié donc que Insidious, qui m'avait bien plu pour son ton original et son excellente interprétation (Patrick Wilson et surtout la belle Rose Byrne
The Conjuring se base sur une des 4000 enquêtes répertoriées par le couple Warren, soit disant la plus effrayante. Une famille constitué d'un père, d'une mère et de 5 filles viennent s'installer dans une maison du Rhode Island, dans le village de Harrisville. Très vite, des événements inquiétants se déclarent : bruits étranges, portes qui s'ouvrent ou se ferment seules, horloges qui s'arrêtent toutes durant la nuit, bleus qui apparaissent sur le corps de la mère de famille... Jusque là, tout se tient : l'histoire est très bien menée, très bien jouée, le fantastique est amenée calmement, par de petites touches progressives. Même les premiers grosses frayeurs sont cachées : ainsi l'agression de Carolyn Warren dans la cave est elle filmée derrière la porte qui y mène, préférant cadrer Roger, le père, qui arrive à la rescousse. Même chose pour la séquence ou Christine (l'émouvante Joey King, déja repérée dans des blockbusters comme The Dark Knight Rises et Le Monde Fantastique d'Oz), la troisième fille de la famille, tente de convaincre sa soeur aînée Nancy (Hayley McFarland, qui a incarné la fille de Tim Roth dans la série Lie to Me) qu'il y a quelqu'un derrière elle, derrière la porte dans le noir... On ne verra rien, si ce n'est la porte qui claque. Autre séquence réussie : celle où Carolyn (Lili Taylor, excellente, qui efface ici le vilain souvenir de sa prestation dans le lamentable Hantise -1999- de triste mémoire) se retrouve seule avec sa dernière fille (Kyla Deaver, seule débutante parmi les demoiselles de ce film, et elle assure déjà pas mal) : la scène de la boîte à musique est très réussie, on croit y voir quelque chose et paf ! La petite fait une farce à sa mère. Remarquable moment de tension. Juste après, elles se mettent à jouer à cache cache et là la première vraie apparition arrive : Carolyn réclame un claquement de mains et c'est le fantôme qui lui répond. Excellent aussi. A partir de là, les choses commencent à se précipiter : les deux dernières filles non citées, Andrea (Shanley Caswell, apparue dans de nombreuses séries et une comédie d'horreur, Detention), l'aînée, et Cindy (Mackenzie Foy, celèbre pour son incarnation de Renesmée dans les 2 derniers Twilight), l'avant dernière, en proie à des crises de somnanbulisme ; sont témoins de la première grosse apparition du démon : en voulant arrêter la crise de Cindy, Andrea se retrouve agressée violemment par le fantôme. La scène, bien que plus classique ques les précédentes déjà décrites, est flippante à souhait.
A partir de là, ça se gâte : en dépit de l'efficacité de la mise en scène et du brio de l'interprétation (sans parler des atouts techniques : excellente photographie, décors réussis, musique effrayante à souhait), on glisse peu à peu dans les clichés, et quiconque a déjà vu moult films de fantômes et d'exorcismes (c'est mon cas) sera moins surpris. Si on accepte toutefois de jouer le jeu, on continuera à admettre que le tout est très bien foutu et fout bien les jetons. Comme par exemple la scène ou la fille des Warren, Judy (Sterling Jerins, aperçue en fille de Brad Pitt dans World War Z) se retrouve seule chez elle et harcelée par l'horrible poupée Annabelle. Le ton est très efficace, noirceur progressive des couloirs, qui oblige la petite à se réfugier dans le bureau de ses parents, où l'attend cette chère Annabelle... La scène est toutefois un peu gâchée par la projection du rocking chair vers la petite (qui l'esquive de justesse, heureusement), effet vif assez excessif, qui se propagera à tout le film par la suite, quand Lorraine Warren tombera dans le rez de chaussée, l'exorcisme, etc... Toutes ces scènes sont efficaces mais également prévisibles pour un amateur du genre.
Le couple Warren, Lorraine (Vera Farmiga, qui s'y connaît en films d'horreurs avec Esther et Joshua) et Ed (Patrick Wilson, déjà dans Insidious) est très bien campé : Farmiga, en particulier, est très émouvante et crédible dans les scènes ou elle utilise sa voyance. Wilson aussi est très bon, mélange d'assurance et de protection envers sa femme et les victimes des fantômes démoniaques. Par contre, Ron Livingston, qui incarne le père de la famille Perron, est un chouïa en dessous des trois autres personnages vedettes, son rôle étant plutôt passif et témoin comme ses filles. John Brotherton et Shannon Kook, qui incarnent respectivement Brad, un policier venu prêter main forte, et Drew, l'assistant des Warren, apportent aussi un léger relief inattendu, qui fait un peu respirer l'histoire. En particulier Brad qui apporter un certain humour lors d'une scène, et qui ne détend toutefois pas la peur qu'on ressent, ce qui a le mérite d'être noté.
L'exorcisme qui tient la fin du film est à mon avis le moment le plus faible : Carolyn se retrouve donc possédée par le fantôme principal de la maison, et tente de tuer ses deux dernières filles. On se retrouve donc dans le cliché total (ça commence même par "Vadre Retro satanas !") du gars qui commencer par lire du latin et arrive à repousser le démon. Le tout est bien joué et bien filmé, bien entendu, mais n'apporte aucune surprise ni subtilité. On tient même quelques invraisemblances : Carolyn conduit sa voiture, possédée (tiens ! les gens savaient donc déjà conduire en 1800 ?) et ne prend que deux de ses filles, sans qu'on sache pourquoi. La scène finale est assez dégoulinante de bons sentiments. Mais cela ne gâche toutefois pas le plaisir qu'on a eu à frissonner tout au long de l'histoire.
En définitive, The Conjuring est un fort bon film qui remplit parfaitement sa mission, faire peur, mais il reste finalement bien classique, moins original qu'Insidious. Cela n'empêche pas qu'on passe un excellent moment à frissonner, pour peu qu'on soit adepte de ce genre de films :)