« Elle est venue voir. Je n’ai aucune photo de Simon à lui montrer, aucune trace que ces plans volés, pris des fenêtres de chez lui, du côté du métro Jaurès : le canal, les voitures, la vie de quartier et cette poignée de réfugiés afghans confinés sous la voûte Lafayette… Alors, Elle visionne avec moi, Elle m’interroge, nous voyons défiler les saisons de cette dernière année de ma vie avec Simon, les derniers mois du combat harassant des réfugiés pour trouver une place ici, à Paris. Bien sûr, tout est fini, campement et histoire d’amour, mais Elle et moi savons désormais que, l’air de rien, le monde entier en a été légèrement… transformé. »
« Jaurès » est le relevé quotidien, au plus près, d’une réinvention infime mais précieuse, des notions épuisées que sont l’amour et la politique tels que le vingtième siècle nous les a léguées. à Jaurès, mon prochain n’est pas mon semblable, mon amant n’est pas mon copain, mon droit n’est pas mon dû, rien n’est acquis. Tout se renégocie jour après jour… Après des études d’Histoire de l’art, Vincent Dieutre intègre l’IDHEC puis séjourne à Rome et à New York (Villa Médicis hors les murs, 1989). Il se tourne dés 1994 vers la réalisation avec « Rome désolée » mais il continue d’écrire et d’enseigner à l’université, à la Fémis, et dans les écoles d’art. à la fois documentaires et autobiographiques, ses films, nourris de musique, de peinture, et de sa vie intime, ont reçu plusieurs prix et ne cessent d’interroger les frontières entre cinéma et art contemporain, de la projection en salle à l’installation (« Sakis », « Un Tombeau »), de l’exercice d’admiration (« EA2 », « EA3 ») à la création radiophonique (« D’abord rompre »). Vincent Dieutre prépare son prochain long métrage « Orlando Ferito ». Filmographie : « Rome désolée » (1995), « Leçons de ténèbres » (2000), « Entering Indifference » (2000), « Bonne Nouvelle » (2001), « Mon voyage d’hiver » (2003), « Fragments sur la grâce, EA2 » (2006), « Despuès de la revolucion » (2008). « Jaurès » a obtenu le Prix spécial du jury aux derniers Teddy Awards. (Hervé Joseph Lebrun, « Chéries-Chéris 2012 »)