Avouez qu’un tel film, quand on le prend comme ça, tel quel, il a sacrément de la gueule. Réalisé par Ridley Scott, écrit par Cormac McCarthy, avec au casting des grands noms tels que Brad Pitt, Michael Fassbender, Penélope Cruz, Javier Bardem avec une nouvelle coupe improbable, et Cameron Diaz. Un chef d’oeuvre couru d’avance? Ahah et bien non, c’est même l’opposé d’un chef d’oeuvre que propose Ridley Scott, qui fait plus que décevoir dans ce thriller qui n’est même pas capable de fournir un seul petit frisson. Bon, après, il ne faut pas trop exagérer, c’est pas une immense catastrophe non plus, mais l’ensemble ne se contente que d’un moyennement acceptable. Il y a un lien très intéressant à faire entre le scénario et la mise en scène de Scott, puisque à un moment donné du film, on nous dit au travers d’un dialogue, que le bijoutier face à un diamant est forcément cynique, puisque ce qui rend le diamant beau, ce sont ses imperfections, et que le métier de celui-ci, c’est de les chercher pour les exposer. Et c’est tel quel que Scott s’est posé, et a abordé le scénario de McCarthy, avec cynisme et distance, faisant apparaître tous les défauts possibles du film de façon à ce que l’on les contemplent bien. Le problème, c’est que son film est loin d’être un diamant, et que les défauts ne le rendent pas plus beau, ou plus intéressant. Car avec tout ça, on se retrouve face à une histoire interminable dont on se fout complètement, aux enjeux dramatiques inexistants enfouis sous une mise en scène superficielle, et portée par un casting qui n’est pas assez mis en valeur pour faire exister les personnages de façon assez conséquente pour qu’on éprouve la moindre empathie pour eux. Mais même si ce constat est plutôt rude envers Ridley Scott, on peut aussi blâmer McCarthy, qui à défaut d’avoir pondu un bon scénario, a plutôt écrit ce qui aurait pu être un très bon roman. Là encore, le problème, c’est qu’un bon roman ne fait pas toujours un bon film. Mais même si la mise en scène de Scott reste superficielle, et ne se préoccupe pas de ce qu’elle est censée raconter, elle possède tout de même quelques points forts, à commencer par une photographie sublime, qui donne au film ce ton si froid, et ses (bien trop rares) séquences d’action, ainsi que deux exécutions dont vous vous souviendrez sans doute longtemps, auxquelles on ne peut faire aucun reproche. A noter aussi, que même si le scénario n’est pas bon, il n’est pas non plus mauvais et offre au moins quelque chose d’assez jubilatoire: ses dialogues. Le film est très très bavard, il ne raconte pas toujours des choses utiles au déroulement de l’histoire, et ces multiples conversations qui n’ont à chaque fois lieu qu’entre deux personnes ne servent qu’à approfondir en vain des personnages qui n’existent pas à l’écran, mais c’est vraiment super bien écrit, il y a un style, et un humour noir assez appréciable. Toute l’oeuvre ne se résume donc qu’à quelques fulgurances un peu malheureuses, qui n’ont pour seul mérite que le fait d’être esthétiquement belles. Alors, finalement, bien que cela n’ait rien à avoir avec le film, je me demande si ce semi-échec n’est pas en parti dû au décès soudain du frère de Ridley Scott, Tony, survenu en plein milieu du tournage, et qui expliquerait un tel manque d’investissement, ainsi que ce cynisme et cette impression de vision complètement détachée sur un scénario qui avait bien besoin d’être repris en main, et d’être affublé d’un peu de tension dramatique, pour fonctionner à l’écran. Cartel est loin d’être insupportable, mais la déception est forcément au rendez-vous quand un tel projet, associé à de si grands noms, se contente de quelque chose de moyen, et se repose uniquement sur des qualités esthétiques, ainsi que sur quelques idées ingénieuses de mise en scène durant des scènes d’action qui se font attendre. Une oeuvre extrêmement mineure dans la filmographie de Ridley Scott, que l’on oubliera bien vite.