Il en aura fallu du temps. Patienter de longues semaines pour enfin découvrir cette version longue de The Counselor, film ultra décrié à sa sortie, et qui durait d’ailleurs 25 minutes de moins que celle qui m’a été proposé de voir. Et bordel, ça valait le coup d’attendre.
Je n’ai pas eu la chance de le voir en salles, mais même sans l’avoir vu, je peux quasiment assurer qu’il y a un sérieux problème avec la version ciné. Pourquoi une si mauvais réception, franchement ? Dans tous les cas je suis pressé de découvrir ce qui manquait en salles, car autant dire que dans cette mouture toute fraiche, rien n’est en trop, tout se tient, et c’est un véritable bonheur d’écriture et de mise en scène.
Comme prévu, on a à faire à un exercice de style de Sir Ridley Scott. The Counselor est tout de même un film très particulier et pas très accessible. Disons qu’il faut être disposé à le voir et qu’il faut savoir un minimum à quoi s’attendre : il va falloir être patient et attentif.
Bref, le film commence avec une scène particulièrement torride qui donne le ton : ça va être délicat, malin et jouissif. Dans le rôle principal, Fassbender, avocat qui décide d’aller voir si l’herbe est plus verte du côté des cartels, et qui va bien s’en méprendre. On vit clairement le film à travers son personnage, prenant tantôt le rôle du businessman à la gestion futée, tantôt celui du mec qui ne sait pas trop encore où il met les pattes. En gros, il a le cul entre deux chaises, et chacun de ses dialogues avec les personnages qu’il va rencontrer vont le mettre dans la position du dominateur ou bien du dominé.
La quasi-totalité du film est constituée de face-à-face verbaux mettant en scène différents types de personnages. Alors si Fassbender navigue en eau trouble, on peut clairement remarquer que Cruz, qui n’est autre que sa future femme, symbolise l’innocence. La sulfureuse Diaz est l’incarnation du diable, et Bardem, l’homologue de Fassbender, pourrait être considéré comme le mec un peu trop sûr de lui. Reste Pitt qui semble être bien au dessus de tout ça et ayant toujours un plan de rechange. En définitive, quelque soit l’identité des personnages qui discutent (car oui, c’est un film où ça blablate plutôt pas mal), il est toujours possible d’analyser les enjeux de l’histoire. On retrouve une espèce d’opposition bien/mal permanente avec Fassbender au milieu de tout ça.
L’intrigue principale en elle-même n’est pas originale pour un sou (une histoire de cartel) mais à l’honneur de servir le message de Cormac McCarty qui nous confirme après No Country for Old Men sa vision pessimiste sur le monde dans lequel nous vivons. McCarthy dépeint un monde où il n’y a pas de confiance entre les hommes, et où ils se battent tous individuellement pour la gloire et l’argent, et qu’ils courent à leur perte.
Le traitement de ces thématiques sur les relations sociales et politiques est très proche du film des frères Coen sorti en 2008. Alors pourquoi décrier ce film ? Dans cette version longue, il faut certes s’accrocher, mais tout se tient et il suffit d’être patient et attentif. Autant Scott a pu faire des films bien en dessous de ce qu’on est en droit d’attendre de lui, autant The Counselor est probablement l’une de ses plus grandes réussites. Visuellement, c’est un pur bonheur, la photo est vraiment exquise. La direction d’acteurs est parfaite, et il faut même dire que le Sir s’est permis quelques petits plaisirs ici et là, et ça fait plaisir à voir. Puis il y a quand même un sacré lot de punchlines bien savoureuses et de situations absurdes pour notre plus grand plaisir.
L’équilibre est à mon sens parfait. L’un des meilleurs films de 2013 avec Django, le Loup de Wall St, Mud, et Only God Forgives.