La Nuit Nomade, troisième film de la trilogie de Marianne Chaud après Himalaya, le chemin du ciel et Himalaya, la terre des femmes se veut le récit documenté de la vie d’éleveurs nomades sur les hauts plateaux du Karnark. Si le fil conducteur de son documentaire peut sembler léger par son fond, c’est pour mettre en relief un regard plus juste des évènements qui s’écoulent devant nos yeux. Une évasion réflective au regard de notre époque.
Dans un premier temps, Marianne Chaud dirige son documentaire par un regard délicat et discret pour nous faire rentrer, puis partager l’intimité de cette communauté. On s’invite alors délicatement dans le quotidien de ces éleveurs.
La proximité que créer la réalisatrice en parlant leur langue contribue beaucoup à cette facilité d’immersion, ils réalisent des gestes du quotidien avec une régularité habituelle pour eux et une découverte pour nous. Au fur et à mesure que la distance s’amenuise, les protagonistes se livrent de plus en plus ; parlent de cette obligation de rester dans la plaine du Ladkah alors que les générations futures seraient promises à un avenir plus radieux. Chaque année des départs pour « la ville » ont lieu.
L’ensemble des conversations établies donne bon nombre de discussions profondes quant à l’existence de leur métier et de leur vie sur le plateau à près de 4500 mètres d’altitude. Emprunt d’un humour touchant, se dégage également une réflexion sur la condition humaine nous ramenant à notre vécu dans un monde moderne et matérialiste.
Si la réalisatrice n’ose prendre de hauteur quant à son regard sur cette communauté. Il en est tout autre des paysages qu’elle nous offre à voir. Majestueux, entre roche et désert, blancheur de la neige et couleur chaude de l’aridité, l’emprise d’une nature grandiose nous immerge dans ce paysage entre le Tibet chinois et le Pakistan. Contribuant grandement à la réussite du film, suivre ces nomades dans les plaines arides est un voyage sur toile en soi.
Etrange questionnement du spectateur qui s’emploie à regarder ce qui se déroule devant ses yeux mais Marianne Chaud a le talent de ne jamais tomber dans le misérabilisme et fait uniquement partager avec émotion, les choix empiriques que ces éleveurs doivent faire. Chaque année leur communauté se déciment peu à peu. Loin des formats courants des documentaires récents, La nuit nomade marque le pas par sa forme et son fond, la réalisatrice, intégrée à cette communauté, et le décor, le Ladkah, forment cette unité.
S’il ne pourra convaincre la majorité, La nuit nomade, réussit à nous proposer une évasion trop courte vers un monde, une culture et une forme de pensée loin de notre société. L’intégration de la réalisatrice à cette communauté permet un regard profond et partagé afin d’être au plus proche de ces nomades, sans jamais oublier une profondeur humaine.
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