J’attendais beaucoup de ce "Sinister", dont la bande-annonce promettait un grand moment de terreur et une utilisation intéressante des films en Super 8. Et, au final, j’ai été déçu… très déçu même tant le film ne fait qu’effleurer son sujet pour se vautrer dans tous les poncifs du genre. On retrouve, ainsi, les longues séquences silencieuses dans le noir, une multiplication de jump screaming (c’est à dire des apparitions "surprises" accentuées par la BO) bien peu subtils, l’inévitable intervention du spécialiste de l’occulte qui va tout expliquer au héros (et, donc, aux spectateurs) ou encore la maison isolée dans laquelle va s’installer une famille alors qu’un carnage s’y est déroulé quelques années plus tôt. Ce dernier point aurait pu être, d’ailleurs, une qualité puisque le héros (Ethan Hawke, qui s’offre une nouvelle carrière dans le genre horrifique), écrivain en panne d’inspiration, s’installe volontairement dans cette maison pour s’imprégner de son ambiance malsaine sans que le reste de la famille ne soit au courant (à ce titre, j’ai trouvé que le personnage de l’épouse manquait franchement de cohérence
tant il est incompréhensible qu’elle ne quitte pas son mari en découvrant sa nouvelle trahison)
. Cette idée, excellente en soi, démontre un vrai souci d’écriture au niveau des personnages (on sent bien que le héros n’est pas très clair et que le couple est au bord de l’implosion) mais cet effort est sérieusement mis à mal par le parti-pris du réalisateur Scott Derrickson de cantonner sa mise en scène à une succession poussive de projection de films en Super 8, entrecoupée des poncifs visés précédemment. L’exploitation de ces films en Super 8, qui devaient être le point d’orgue du film, résume, à mon sens, le raté de "Sinister". Ces séquences, assez effrayantes en soi tant les meurtres qu’elles montrent sont épouvantables
(l’assassinat d’une famille entière avec un mode opératoire différent à chaque fois)
, sont rapidement désamorcées en raison de leur utilisation trop systématiques et de leur représentation trop schématisée
(la famille avant le meurtre puis pendant la mise à mort)
. La surexploitation de ces films, censés ancrer le récit dans un certain réalisme, se marie, en outre, assez mal avec l’orientation "fantastique" du scénario et, plus précisément avec
l’identification du responsable des meurtres (le démon Baghul, pas forcément un modèle d’originalité)
. "Sinister" se rattrape un peu grâce à son twist concernant
l’implication des enfants des familles tuées (qui sont manipulés par le démon pour assassiner leur famille)
et à sa scène finale, qu’on voit un peu arriver mais qui reste gentiment perturbante, malgré une représentation étonnement timide au vu de ce que nous montre les films Super 8. Au final, "Sinister" est un film qui aurait pu (aurait dû !) être un vrai choc visuel mais qui, en l’absence d’un grand metteur en scène et d’un récit plus cohérent, s’avère être un rendez-vous manqué… qui n’a pas empêché le film de cartonner et de s’offrir une suite.