Bien qu’il soit passé à côté du Projet Blair Witch et de son succès commercial, le producteur Jason Blum a su se rattraper en donnant naissance à d’autres films d’horreur à petit budget, tels que Paranormal Activity et Insidious (qui donnèrent naissance à des franchises). Un début lucratif prometteur qui lui permit par la suite de produire d’autres longs-métrages qui marcheront tout autant, dont American Nightmare mais également le film qui nous intéresse ici : Sinister. Un film d’épouvante réalisé par un cinéaste qui s’était déjà attelé à ce genre de divertissement (Scott Derrickson pour L’exorcisme d’Emily Rose), ça avait de quoi emballer. Et vous aller voir que Sinister saura convaincre même les plus réticents.
Sa force, il la tire de son script qui se présente à nous comme un mix entre deux genres : le polar à la limite du thriller et le film d’épouvante. D’un côté, nous avons cet écrivain qui cherche à retrouver son succès d’antan en enquêtant sur des faits divers qui (bien entendu) auront un lien et qui s’obstinera à faire tomber les masques (à trouver l’identité le coupable de tous ces crimes). De l’autre, une histoire de croquemitaine (une sorte de démon d’un temps ancien) qui apportera son lot de phénomènes paranormaux et de jump scares à la Insidious. Le tout nous plongeant dans une mise en abyme de la vidéo, des enregistrements en super 8 ayant leur importance dans le script et qui apportent à l’ensemble un petit supplément sur la puissance de l’image. Bref, vous l’aurez compris, Sinister aurait très bien pu être l’adaptation d’une œuvre de Stephen King, tant l’univers du film et celui de l’écrivain semble similaire et possède les mêmes qualités : une ambiance à la fois intrigante et un peu flippante, un personnage principal qui n’est pas si clean qu’il en a l’air… Tout ce qui faut pour captiver notre attention !
Outre un scénario intéressant, Sinister possède bon nombre de qualité qui le font sortir des autres productions horrifiques de Jason Blum. À commencer par la mise en scène de Scott Derrickson. Un cinéaste qui arrive à installer une ambiance dérangeante de manière plutôt efficace, via des jeux de lumières bien gérés (bien que trop souvent plongées dans l’obscurité, certaines scènes font leur petit effet) et des plans bien pensés, qui évitent la surdose de jump scares (
il suffit du plan d’une fillette derrière notre héros pour que l’on sente les frissons sur notre pea
u). Des effets d’une simplicité enfantine qui font de Sinister un thriller à tendance horrifique divertissant et de bonne facture, qui sait tenir en haleine jusqu’à son final, et servi par de bons comédiens (Ethan Hawke en tête). Que demander de plus, honnêtement ?
Peut-être une réécriture totale de certaines scènes, notamment la fin du long-métrage. En y regardant bien, les films d’épouvante ont toujours tendance à laisser le spectateur sur leur faim, lui proposant un dénouement avare en explications ou, la plupart du temps, en crédibilité. Avec Sinister, le sentiment de frustration n’en sera que plus fort. En effet, tout le long du film, ce dernier nous dresse le portrait d’un démon dont il nous tarde, du coup, de voir en pleine action. En somme, nous attendons forcément que l’ensemble se termine sur une sorte d’affrontement entre notre protagoniste et cette créature qui ne rime qu’avec mort et cruauté. Mais au lieu d’une séquence spectaculaire qui aurait été nécessaire surtout après une telle montée en puissance, Sinister préfère rester dans la sobriété, hésitant entre réalité et fantastique, pour se finir brutalement et de manière maladroite. Comme si le tout avait été bouclé à la va-vite parce qu’il fallait y mettre fin. Un constat fort dommage, qui fait ressortir les autres défauts du film (une bande-originale un chouïa énervante et quelques longueurs évitables) qui auraient très bien pu passer inaperçus si Sinister n’avait pas une fin aussi amère.
Ce qui n’empêche pas Sinister d’être une petite production Jason Blum de bonne qualité, qui saura attirer votre attention tout en vous procurant quelques moments de frayeur qui toucheront au but. Simple et efficace. De quoi faire oublier la réalisation précédente de Scott Derrickson (le remake de Le jour où la Terre s’arrêta) et de nos intéresser un peu plus à sa filmographie. Comme quoi, même de nos jours, il est possible de divertir avec seulement 3 millions de dollars en poches !