L’Australien John Hillcoat, cinéaste prometteur depuis le succès de La Route, met en scène les mémoires d’un des descendants des fameux frères Bondurant, dont l’on suit ici les péripéties pour le moins sanglantes. Pour l’histoire, les trois frangins, fermiers du comté de Franklin, auront été d’illustres contrebandiers d’alcool durant la prohibition aux Etats-Unis. Envers et contre un système judiciaire corrompu jusqu’à l’os, c’est finalement lorsque arrive un abominable agent spécial de Chicago que les ennuis commenceront. Violent, aussi subtil qu’un éléphant, un film prétexte à exposé la violence sans pour autant que celui-ci soit dénué d’intérêt, le premier étant pour moi Tom Hardy. Mais Lawless c’est aussi une formidable reconstitution d’époque, dans les coupes de cheveux aléatoires, dans les costumes terreux et mal taillés, dans les fermes crasseuses et les véhicules de son temps.
Rien de compliqué en vue d’approcher le récit. La fabrique clandestine d’alcool en vue de s’enrichir d’une poignée de paysan, sur demande de gangsters des villes, face à une justice primitive et parfois expéditive. Un monde brut de décoffrage qui opposera des durs à cuire à la justice, à l’hypocrisie politique envers la boisson qui fait sourire. L’on ne nous épargne rien, le goudron et les plumes, l’égorgement, l’étranglement, la découpe au rasoir, les tabassages en règles, du sang, encore du sang, cela, contre toute attente, en deviendrait presque jouissif. Oui, lorsque les frères Bondurant partent en guerre, le spectacle est assuré, c’est l’essentiel, le tout dans un contexte fidèlement retranscrit et reconstitué.
Le casting est lui aussi l’un des forces du film d’Hillcoat. Outre un Tom Hardy et son charisme de monstre, l’on a le droit à un Jason Clarke plus à l’aise qu’à l’accoutumée, à un Shia LaBoeuf franchement intéressant, à un Gary Oldman qui ne fait que passer mais qui marque de par son charisme, à un Guy Pierce formidablement abject mais aussi à un tandem féminin majeur constitué de la belle Jessica Chastain et la prude Mia Wasikowska. Tout une ribambelle d’acteurs de premier plan pour composer un univers d’époque, aux couleurs ternes finement choisies, au son des vieux moteurs, dans la fumée des alambiques et dans la crasse d’une Amérique rurale sous-développée.
Des hommes sans loi, parlons français, est pour moi une réussite. Simple d’accès, bien mis en scène, à la narration propre, il n’aura manqué finalement que quelques excès de profondeur dans certains sous-thèmes itinérants au récit. L’on nous plonge en campagne avec comme suspens de savoir qui pourra en repartir sur ses deux pieds. L’aspect légendaire des trois frangins est lui aussi attractif, presque amusant au final, à voir le dénommé Forrest, l’increvable, s’asseoir à la table familiale après avoir failli mourir plus d’une fois. Un film majeur qui aura manqué de profondeur pour convaincre dans les festivals et autres cérémonies, mais de cela, l’on s’en fiche éperdument. 15/20