Une oeuvre réaliste teintée de poésie sur un groupe d'individus vivant en autarcie au fin fond des bayous, leur univers se limite aux méandres des marécages de Louisiane séparé du monde "moderne" par une digue de béton.
La réalisation tient presque du documentaire, avec une caméra à l'épaule omniprésentes, des mouvements de caméra très brusques, assez agaçants par moment d'ailleurs. Film indépendant oblige, les acteurs sont d'illustres inconnus mais délivrent un jeu très justes, notamment Quvenzhané Wallis, qui du haut de ses 9 ans impose de talent et la maîtrise de son rôle. Une actrice en herbe à suivre qui a déjà remporté une foule de récompense.
Un film plaisant à voir, même si le scénario a tendance à tout mélanger, à aborder des thèmes pour ensuite les oublier, en faire réapparaître d'autres mais ne pas les expliquer. Tout ce méli-mélo et l'absence de "film rouge" peuvent laisser perplexe à la sortie du film, on a apprécié l'audace et l'inventivité du jeune réalisateur mais on déplore le manque de repères et de continuité dans l'oeuvre. Comme une bâtisse superbement édifiée mais dont le ciment serait impur, le risque c'est que tout s'effondre. Heureusement ce n'est pas le cas, car il y a tout de même une situation initiale et un résolution de l'intrigue. Ne serait-ce que par les sentiments du père pour sa fille, au départ ils sont simplement ceux de la responsabilité du géniteur envers son enfant, ils ne vivent pas dans la même maison, ne partagent pas les repas. Chacun à sa cabane fait de bric et de broc, on y admire, à travers sa survie, toute l'inventivité et la débrouillardise de Hushpuppy. Quand elle rencontre sa mère, elle redécouvre son père. Et c'est sur son lit de mort, que celui-ci accepte que tous les deux versent des larmes, chose qu'il interdisait formellement, comme l'usage des couverts pour manger, "à la dure" comme il dit ! Même si sa rudesse d'esprit et de coeur peuvent surprendre voire énerver, elle est légitime dans un univers où seules la chasse et la pêche permettent de vivre, chose que ne sait pas faire notre jeune héroïne.
Pour revenir sur les parties quasi inintelligibles du film, j'aborderai le thème des aurochs, je n'ai pas compris ce qu'ils apportaient au film, s'ils étaient une intervention du registre fantastique dans l'univers réaliste et même naturaliste du film, une métaphore des pérégrinations de la fillette dans le monde sauvage ? Que sais-je encore ? Ce sont toutes ces étrangetés qui ne me font pas totalement adhérer au film, même si on se laisse bercer par sa musique délicate et son esthétique travaillée. J'attends avec impatience le prochain film de Benh Zeitlin !
C'est un film qui passera sûrement inaperçu auprès du grand public et sera vite déprogrammé des grands multiplexes alors courez-y pour le voir.
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