Israël est un petit pays, mais son cinéma -du moins, ce que l'on peut en voir- est solide. Ce petit film, tourné par un réalisateur complètement inconnu (Yaviv Horowitz) est tout à fait passionnant. Il risque d'être ignoré par un certain nombre de critiques, parce que c'est la bande de Gaza, au cours de la première intifada, vue du point de vue des Israéliens. Ce qui peut déplaire....
Une unité est envoyée pour contrôler une petite ville. Dès la première patrouille, cela se passe mal. Ils sont accueillis par des gamins -jeunes adultes, ados, mais la plupart sont vraiment des petits mômes- qui leur lancent des pierres. Les ordres donnés par le commandant (Angel Bonami) ont été tout à fait clairs: n'utiliser que des balles à blanc. Un gosse est cependant blessé. Aussitôt, c'est une marée de mères hurlantes qui se jette sur le petit groupe. Le désarroi des soldats, qui n'ont pas été préparés à ce type d'affrontement, est très bien montré. C'est alors que d'une terrasse, on balance sur le groupe non plus une pierre, mais une machine à laver. Et Ilya, l'un d'entre eux est tué.
Quatre soldats sont alors détachés pour occuper cette terrasse d'où la machine a été lancée, et surveiller l'ensemble du quartier. Le chef du détachement pense à sa libération prochaine, et aux pétards qu'il ira fumer à Amsterdam..... il n'a aucune autorité sur son groupe. Il n'arrive même pas à empêcher deux des garçons descendre bouffer un houmos au resto du coin, au péril de leur vie. Il installe une sono sur la terrasse, pour contrer le muezzin tout proche, et fume en rêvassant; il se trouve même un chien -animal impur!- qui ne fera qu'attiser la haine des habitants de la maison. L'un ne cesse de répèter que, si on avait utilisé de vraies balles, Ilya serait encore vivant. Dans le groupe, il y a aussi Tomer (Yon Tomarkin) qui est particulièrement mal dans sa peau.. Il est fiancée, avec une fille qui est soldate aussi, il voudrait juste vivre, une vie de couple normale. Et il est conscient d'être en train de complètement perdre la boule.
Dans la maison, il y a le père de famille, bonasse et dépassé. La mère, agressive et pleine de rage. Il y a un petit marmot édenté qui adore courir après les soldats pour jouer à "haut les mains", la seule phrase israélienne qu'il connaisse.... Tomer est prêt à jouer avec le marmot. Haut les mains, peau de lapin! le gamin fait prr, prr, avec deux doigts en forme d'arme, Tomer fait semblant de s'effondrer. Situation absurde....
Horowitz nous montre bien à quel point cette armée, cette grande, forte, impitoyable armée israélienne était en fait, mal préparée à assumer cette guerre civile. C'est là qu'on voit, évidemment, la supériorité de l'armée de métier sur l'armée de conscription.... Affronter ça -l'immersion dans un milieu hostile, où tout le monde vous hait, ou la mort peut venir de n'importe où, même d'un gamin avec la tête de Maradonna sur son tee-shirt -c'est un métier. C'est ça que le film nous montre, très intelligemment. Et même s'il se place clairement du côté des Israéliens, ce n'est évidemment pas une mise en accusation des résistants. C'est juste pour nous montrer à quel point cette guerre a été, est toujours imbécile. Ces jeunes soldats sont au départ, dépolitisés. Ils risquent de revenir racistes.
C'est à voir, absolument.