Inutile de revenir sur l'inspiration du cinéaste en ce qui concerne le "Blow Up" d'Antonioni, ce ne serait que paraphraser tout ce qui a déjà été dit. Toutefois De Palma n'est pas dans un bête excercice d'hommage, mais, au contraire, se réapproprie cette base pour mieux y déployer ses obsessions.
En cela, la scène d'introduction voit De Palma réfléchir sur le cinéma, Jack Terry (très bon Travolta) étant conscient de la médiocrité du long-métrage sur lequel il travail. Mais, si "Blow Out" parle de cinéma, il s'agit surtout d'un grand film paranoïaque post-Watergate.
Cependant, si cette ambition ouvre un horizon passionnant, et parvient à l'être dans sa première partie, le cinéaste décide très vite de multiplier les points de vue. Choix compréhensible tant le regard est un motif essentiel du récit (celui de Jack Terry, "témoin" malgré lui, ainsi que celui du tueur) mais qui fait perdre par là-même tout sentiment de perte de repères, en plus d'alourdir inutilement le récit.
Si la narration n'est pas toujours des plus pertinentes, et que le long-métrage accuse d'une sévère baisse de rythme dans la partie centrale, De Palma lui, signe une mise en scène des plus inventive. Maitre dans l'art de faire monter la tension, il fait preuve de ruptures surprenantes dans la scène précédent l'accident ainsi que d'une suspense haletant lors du final, bien que le plus magistral reste la séquence durant laquelle Travolta se rend compte que ses bandes ont été effacées. Tout autant dynamique que désespéré.
Enfin, la noirceur dont fait preuve De Palma est réellement inattendu, ce dernier ne jouant pas le jeu du "héro malgré lui", préférant inscrire son personnage principal dans une ligne tragique bien plus percutante, dans laquelle personne n'est épargné et ce jusqu'à un final glaçant.
Si "Blow Out" est un film imparfait, causé en grande partie par une construction narrative inégale et problématique, la force formelle de De Palma, ainsi que son écriture surprenante, permettent au long-métrage d'accrocher le spectateur.