Je trouve ce film puant. Idéologiquement, il est condamnable. Cinématographiquement, il est nullissime. Expliquons, et d’abord, un résumé du scénario et de ce qu’il semble vouloir impliquer.
Paris, de nos jours. Sabrina, jeune femme moderne, d’origine algérienne, est affligée d’une famille de... quarante frères, ce qui est proprement une absurdité sur laquelle on peut s’interroger : cela n’existe que chez certains dictateurs d’Afrique noire, mais aucune famille modeste n’a autant d’enfants. Or ces quarante frères (aucune sœur, vraiment ? Par quel miracle ? À moins que les filles soient comptées pour zéro, comme les sœurs de Jésus dans les évangiles), ces mâles, donc, sont très traditionnalistes, selon le cliché de cinéma sur ces arabo-musulmans qui justifient tout par l’islam quand il s’agit de cloîtrer « leurs » femmes » (sœurs et mère), mais pas lorsqu’on va au café boire de la bière pendant le Ramadan. Je connais suffisamment d’arabo-musulmans à Paris pour écrire que cette situation n’a aucun fondement. Le pire de tous est Slimane, qui s’est autoproclamé chef de la famille parce qu’aîné – alors que le véritable aîné, qui est homosexuel, en a été exclu. Or Sabrina veut épouser l’homme qu’elle aime, Dorcy, un jeune Noir qui fait l’acteur sans grand succès. Il s’ensuit que les frères de la fille tout autant que la mère du garçon s’opposent à ce mariage (paradoxe : Slimane fréquente une jeune Juive et veut devenir « le père de [s]es enfants », alors même que le judaïsme prescrit que la judaïté se transmet par la mère, donc il aura des enfants juifs !). Le dialogue prévoit donc de nombreuses scènes où ces désaccords sont débattus et ressassés, sans qu’aucune des parties consente à écouter l’autre. On assiste par conséquent à une série de diatribes contre l’autre camp, venues des deux côtés : la mère noire ne veut pas d’une « Blanche » pour belle-fille, et signifie à son fils qu’elle ne le verra plus, tandis que Slimane, le prétendu frère responsable de la famille, tente d’obtenir d’un de ses frères, qui est policier, qu’il enquête sur Dorcy, ce qui est naturellement illégal et impossible. À ces débordements s’ajoute une scène inexplicable : Dorcy est enlevé puis engouffré dans une camionnette par des agresseurs qu’on n’identifie pas. Mais on le voit ensuite torturé à l’électricité... or cette scène, factice, sert aux besoins d’un film que tourne une femme qui l’a engagé, et qui dirige une équipe d’incapables (ils ont oublié de mettre une cassette dans la caméra numérique). Fausse piste, par conséquent, mais gratuite.
Ce qui importe, c’est que ce scénario qu’on croirait conçu par Jean-François Copé s’avère intrinsèquement malhonnête et tendancieux, car il entend prouver sans autre preuve que l’antagonisme, ou plutôt la haine, entre Noirs et Arabes, n’est pas près de s’estomper. Hypothèse douteuse idéologiquement, mais c’est ce qui semble avoir séduit la critique des bobos, allez savoir pourquoi. À la fin, Dorcy rencontre Slimane par hasard, dans la rue, et... il s’excuse !
Quant à la réalisation, elle est absolument calamiteuse, ce que ne justifie pas le manque d’argent, puisque le son du film, lui, est correctement capté et post-synchronisé. Précisons que l’auteur a écrit le scénario, filmé les images, fait la prise de son et le montage, et que le tout l’a occupé pendant des années. Or le résultat ressemble à ce qu’obtiendrait un garçon de treize ans qui étrennerait son premier caméscope ! Uniquement des gros plans tremblotants de visages en général maussades, montage haché, succession frénétique de zooms avant/zooms arrière, à mettre le spectateur au bord du vomissement. Je ne dis rien de la prétention incroyable de son auteur et de son absence de jugement politique.
Décourageant.