Après avoir lu les critiques négatives, puis positives attribuées à ce film, j'ai enfin compris ce qui clochait chez ces individus qui n'ont pas su se laisser captiver par ce que je considère comme le meilleur film de 2013, si ce n'est des dix dernières années.
Un film n'est pas forcément un roman, avec une histoire qui commence au début et se termine à la fin, une intrigue, un problème à résoudre. Malgré tout le réalisme qu'il peut contenir, la base d'un roman reste "une histoire".
Cependant, le cinéma a des capacités autres que de raconter une aventure, il n'est pas forcément narratif, et il perd parfois à l'être. Korine l'a bien compris. Il faudrait regarder ce film en prenant des notes pour saisir tout le travail visuel et auditif qui a été fait (par exemple, un calibre qui se charge, un tir, pour marquer des changements de scène), la critique qui a été établie contre une génération qui se perd dans la démesure et l'animalité, mais aussi contre tout ces films comme AMERICAN PIE, PROJET X, ou autre films ou la violence et le manque de morale et de bienséance est subtilement mis en valeur. Après tout, le public en redemande, puisqu'il a évolué avec son époque.
Alors Spring Breakers, c'est ça, c'est tout ce que le public demande, mais à outrance, puissance 1000. Des plans longs et insistants sur des nibards, des fesses qui remuent dans tous les sens et en détails, de la violence à gogo (toujours au ralenti) de la dubstep lourde et agressive qui contraste avec le reste de la BO énigmatique et classique d'un film tout ce qu'il y a de plus banal, la photographie contrastée à l'outrance, la consommation de drogue et j'en passe. Il s'agit de montrer à l'humain qui sommeille en nous : voilà ce que vous revendiquez, ce que vous regardez au cinéma, ce dont vous rêvez, mais sans la subtilité qui garde vos consciences tranquilles et vous amène à croire que c'est "cool".
Pour en venir à mon point essentiel : si l'on devait retranscrire Spring Breakers en un livre, il appartiendrait surement au genre du "nouveau roman" : expérimental, difficile, et bien souvent mal compris et dévalorisé. Il faut le réfléchir, le ressentir, et non pas attendre que l'image le son et les dialogues nous donnent directement les informations nécessaires pour comprendre le film : il est lent, certes, mais c'est justement pour laisser le temps au spectateur d'analyser ce qu'il se passe sous leurs yeux. Des phrases et images se répètent? C'est pour insister sur la dimension onirique de la chose. Car en effet, Spring Breakers est comme un rêve des plus réels qu'il soit : les acteurs sont d'ailleurs en improvisation lors de la plupart des scènes, afin qu'ils donnent d'eux même, leur personnalité telle qu'elle aurait été dans cette situation. (Korine dans une interview, annonce que les larmes de Selena Gomez face au bad boy Alien n'étaient pas si jouées que ça).
Spring Breakers a été pour moi une expérience, je n'ai jamais ressenti autant de dégoût et de fascination à la fois, car il faut dire que malgré que le message soit passé, Harmony Korine, en jouant avec le langage cinématographique, les vices humains, et en s'entourant d'un casting PARFAIT, nous plonge dans un univers, un autre monde (ceux qui ont vu le film l'ont bien compris!) qui est presque tentant. Je suis sortie de la salle, avec cette impression d'avoir fait un rêve très étrange et perturbant, et avec une envie de le revivre encore et encore pour mieux le saisir. C'est un film à voir 15, 20 voir 30 fois, pour capter le jeux des couleurs, des lumières, du son, du cinéma, tout simplement.