Film dramatique, écrit et réalisé par Harmony Korine, Spring Breakers est un long-métrage atypique, aussi qualitatif que déroutant. L'histoire nous fait suivre quatre adolescentes lassées de leur vie monotone d'étudiantes à l'université, qui décident d'aller en Floride pour participer au spring break annuel et découvrir de nouveaux horizons. N'ayant pas d'argent, trois d'entre elles braquent un fast-food pour récolter la somme nécessaire à leur séjour. Ce synopsis est le point de départ d'un scénario hypnotisant à suivre pendant toute sa durée d'une heure et demie. Même si l'intrigue met du temps à se dessiner et qu'elle n'est pas d'une grande profondeur, on est immédiatement pris par ce récit planant. On se laisse porté, comme envoûté, par cette ambiance singulière faite de débauche, de violence et de réflexions. Celle-ci est très spéciale puisqu'elle est paradoxalement aussi onirique que vulgaire, à l'image des deux thématiques principales en oppositions qui s'affrontent entre puritanisme religieux et décadence. Ce mélange explosif donne lieu à un enchaînement de scènes ou se côtoient ces deux aspects antinomiques. Drogue, sexe, alcool, armes, tous ces vices que trainent les quatre jeunes femmes de pouvoir interprétées par des actrices sexualisés et désirables que sont Vanessa Hudgens, Selena Gomez, Ashley Benson et Rachel Korine. Elles sont entourées par un James Franco en rappeur trafiquant méconnaissable, certes cliché, mais au rôle intéressant pour son instabilité. Le reste de la distribution comporte Gucci Mane en rival. Tous ces individus entretiennent des relations entre amitié, crainte, joie et peine, soutenus par des dialogues entre questionnements existentiels et langage grossier. Si l'on peut trouver les problèmes du quatuor futile, ils évoquent en réalité un profond mal-être générationnel. L'aspect narration est lui très appréciable, tout comme les mots échangés, souvent susurrés, ce qui renforce le côté envoûtant. Sur la forme, la réalisation d'Harmony Korine est tout simplement grandiose. Sa mise en scène très clipesque colle parfaitement au propos. Sa caméra à l'épaule toujours en mouvement, proche des corps sculptés, dégage beaucoup de sensualité, voir carrément de sexualité. De plus, cette esthétique est sublimée par un travail d'éclairage sublimant chaque plans entre lumières naturelles dû au cadre idyllique et néons fluorescents se reflétant sur les protagonistes. Ce visuel coloré nous gratifie de magnifiques images, comme les divers couchés de soleil. En plus de tout cela, le montage jouit d'une grande liberté et joue un rôle important dans l'intrigue. L'ensemble est accompagné tout du long par une b.o. omniprésente entre sonorités électro, rap, et musique pop. Celle-ci renforce encore d'avantage l'atmosphère, tout comme l'ambiance sonore oppressante particulièrement travaillée. Ce séjour, sous forme de descente aux enfers, s'achève sur une fin à la hauteur des attentes, même si elle nous laisse un peu sur notre faim. En conclusion, malgré son allure de film pour adolescent, Spring Breakers est un long-métrage mature, une véritable expérience filmique méritant grandement d'être découverte.