Alors Knight of Cups je ne l'attendais pas spécialement même si la BA m'avait pas mal hypé mais vu que j'avais détesté A la merveille j'étais pas très enthousiaste, je considérais que Malick aurait mieux fait de ne pas persévéré dans ce virement radical qu'il a pris avec The Tree of Life, ou alors qu'il se mette à retravailler ses films durant 7 ans. Avec Knight of Cups c'est l'occasion de modifier mon jugement. Je suis, depuis The Tree of Life, un grand fan de Malick (disons qu'avant j'avais vu Le Nouveau Monde à 10 ans et je m'étais rarement autant ennuyé). Ce qui me plait le plus chez Malick c'est qu'il construit un énorme système théorique, historique (américano-centriste tout de même, bien qu'avec The Tree of Life il prenne un dimension différente) et métaphysique à travers ses films. Avec lequel j'adhère d'ailleurs 90% du temps. Et du coup je me disais qu'avec A la merveille il n'avait plus rien à dire parce qu'on arrive à la superficialité de l'époque contemporaine (c'est aussi pour ça que le film est si pauvre) et c'est avec Knight of Cups qu'il prend un virage qui m’émoustille ardemment (mais déjà largement entamé avec The Tree of Life). C'est marrant que je n'y ai pas pensé avant mais c'est pourtant tellement logique : Malick passe de l'individuel à l'universel, de l'histoire des USA à la métaphysique. Et Knight of Cups est la suite directe d'A la merveille parce qu'on passe de la superficialité à la spiritualité. Et ça c'est beau, et ça c'est grandiose. Et j'ai envie de lui dire pour ses films à venir "Fonce !" mais ne le fait pas à moitié. Parce que je vais y venir, à ce qui ne plaît pas chez Malick. Alors forcément ceux qui ont déjà décroché de son cinéma (s'ils y ont accroché un jour) avec The Tree of Life, n'aimeront ni Knight of Cups, et si mes prognostics sont exacts, aucun de ses films à venir (à moins qu'il essaie de boucler la boucle à un moment donné). Mais parlons plus en détail de ce film. Bien que la démarche de Malick ne puisse se comprendre que sur l'ensemble de son œuvre, un grand tout (et bon Dieu que c'est une entreprise magnifique et sans pareil, comme si tout avait déjà été prévu dès le premier jour). J'ai adoré le film, j'ai quand même des choses à lui reprocher mais je vois très bien où il veut en venir, il essaie de faire son premier film profondément spirituel, et je pense que les autres seront beaucoup plus métaphysiques quittant totalement toute forme de narration (déjà très déconstruite) pour aller vers de la pure sensation, un truc totalement expérimental sur Dieu et l'absolu, il faut se dire que The Tree of Life n'était qu'un prologue, disons, les bases pour comprendre son projet, A la merveille, le vide spirituel et la superficialité, et ici on rentre dans le Tarot, autrement dit l'individu, car le Tarot s'imagine difficilement collectivement (et je pense qu'il développera le collectif par la suite allant de plus en plus vers la cosmologie). Alors on comprend très bien que ce Knight of Cups c'est le bateleur toussa toussa, c'est même assez beau et poétique l'histoire de la perle, simplement je suis surpris qu'il ne suive pas la logique du Tarot, disons qu'en un sens c'est bien, parce qu'il réinvesti assez pertinemment je trouve la symbolique tarologique. Par contre je n'ai eu la sensation de voir le sens des cartes qu'à la toute fin de chaque partie, à la dernière phrase, et je ne suis pas d'accord avec tout (surtout L'Ermite). Et puis je n'ai pas aimé qu'il mêle le christianisme à tout ça, le concept de sacrifice n'a rien à voir avec tout ça, certains considèrent même que le film narre la vie de Jésus (j'ai pas fait gaffe) m'enfin c'est un américain... alors forcément la Bible c'est important pour lui. Parce qu'on a le sacré et de l'autre côté le "profane" enfin c'est plus compliqué que ça, mais je trouve que ça ne colle pas vraiment ensemble. Et puis la dernière partie se nomme "Liberté" et bon ça me gêne dans son système métaphysique, mais de manière plus générale cet optimisme à toute épreuve (enfin je suis optimiste mais pas dans le même sens que Malick je crois) et ça m'énerve d'avoir des points de désaccord quand je suis le mec sur presque toute la ligne. Et puis "Liberté" comme titre c'est nul, surtout quand t'as des cartes qui s'appellent Le Bateleur et Le Mat, et qui expriment la même idée je veux bien qu'on ne finisse pas sur Le Monde parce que le film est "le commencement" comme il le dit mais pourquoi tout d'un coup sortir de la symbolique tarologique ? A un moment on voit des cartes et j'ai vite vu qu'il ne fonctionnait pas avec le Tarot de Marseille du coup peut-être qu'il a des interprétations différentes et comme il recompose un parcours, je me dis que ça peut même être sa propre interprétation. Du reste j'ai trouvé le film somptueux (comme toujours, les mauvaises langues diront que c'est publicitaire et fond d'écran windows) et puis il développe de vrais effets de caméras vraiment impressionnants, il gagne vraiment en maîtrise à ce niveau là (je pense au clip en stop motion en noir et blanc, où au tremblement de terre avec un plan qui m'a littéralement fait perdre pied) et puis des plans qui m'ont fait frissonné avec cette ambiance hypnotique à mi-chemin entre le rêve et le souvenir, qui donne la sensation d'avoir déjà vécu certaines scènes (surtout sur le bord de mer avec cette lumière où j'allais en vacance quand j'étais minot). Après j'aime pas vraiment sa manière qu'il a de réutiliser des plans et de multiplier les personnages secondaires. Mais sinon j'ai trouvé les femmes somptueuses dans ce film et parfaitement bien filmées (même quand elles incarnes la superficialité). En tout cas, ce film, bien qu'emprunt de plusieurs défauts, m'a impressionné de bout en bout (la musique aussi est très belle autant dans la compo originale que dans la playlist, à plusieurs reprises j'ai pensé à Godard pour l'aspect expérimental, poétique, et par l'utilisation d'Arvo Part, forcément). Et bien que je puisse surinterpréter le devenir de la carrière de Malick, car je dois dire que c'est peut-être plus un fantasme qu'une certitude, j'ai sacrément envie qu'il prenne cette direction. Commence.