Trois ans après «Le stratège» («Moneyball» titre V.O) Benneth Miller imprègne encore plus fermement sa filmographie jusqu’ici sans faute avec «Foxcatcher». Incarnation même de ce que le 7ème art fût il y a quelques années, à savoir une œuvre pleine de sens, magnifiée par une maîtrise esthétique indéniable. Il sait donner à ses films cette note, plutôt rare ces derniers temps, d’une aura intemporelle des oeuvres qui se démarquent d’un ensemble, de plus en plus commercial, au dépend de la création et surtout, de l’émotion. Orné de plans et d’une direction d’acteurs parfaitement dirigée, « Foxcatcher » fait parti de ces films ayant autant une âme et qu’une fluidité narrative. Cette dernière, simple ici, met en relief la psychologie d’hommes plus que de simples personnages. Parfumé à l’odeur des eighties le film est constamment reflet d’une (probable) passion ; le sport, encore une fois invoqué ici, qui reste le vecteur de l’histoire, là où l’angle du biopic s’efface judicieusement au profit de la psyché. Mais loin d’être pompeux, sinon élitiste par sa lenteur identifiée, le film prend son temps pour encore plus fermement s’employer à délivrer une déflagration dans sa dernière partie. Les silences résonnent alors comme de vraies luttes, des rapports de force.
Pour incarner John Du Pont, il a bien sûr Steve Carell dont le travail et l’interprétation sont troublants. Totalement méconnaissable, physiquement, tout comme innovant dans le drama proche du trauma ; lui, habitué au comédie. Plus qu’un énième essai de passer d’un extrême à l’autre, challenge courant chez les comédiens, l’acteur livre une prestation magnétique dans sa perversité.
Thriller qui fouille au plus profond de l’âme, des trois principales têtes d’affiche, Benneth Miller en capitaine, propose une lecture de ce fait divers qui fait la part belle aux rapports familiaux, d’abord paternels, par projection, fraternels mais aussi maternels. Orné d’une opacité de non-dits, le film confère un aspect mystérieux, captivant et magistral par sa mise en scène.
Ainsi sous la beauté photographique eighties du film se cache une œuvre étrangement attirante pour qui prend le temps de lutter contre un tempo résolument lent.
Magistral sous bien des aspects «Foxcatcher» s’avère une des plus belles réussites de ce début d’année et un des films les plus intéressants dans la course aux Oscars. Fascinant.