J’avoue avoir été séduit par l’imaginaire et les choix graphiques d’Alain Gagnol et Jean-Louis Felicioli et donc », je souhaitais voir leur précédent film « Une vie de chat », avant de déposer un avis sur « Phantom boy ». On peut d’ors et déjà leur reconnaître un style bien spécifique, très plaisant, jouant sur la fluidité des mouvements, l’assemblage de couleurs chatoyantes et un ton narratif enjoué et poétique, le tout très accentué dans cet opus.
24 heures pour sauver New York, voilà le défi auquel vont être confrontés Léo, jeune garçon de 11 ans et Alex Tanguy, policier maladroit de seconde zone a qui l’on n’a jamais accordé sa chance. Le péril vient de l’homme au visage cassé qui menace la ville d’une fatale intrusion virale numérique dans ses systèmes.
Le pitch, appréhendé de cette manière, n’a rien de très novateur, et c’est là que l’originalité du film entre en scène. Car Léo, souffrant d’une grave pathologie, a le don de pouvoir sortir, avec une belle aisance, de son corps malade, péripétie qui est arrivée également à Alex, tombé dans le coma suite à une rixe. Si la rencontre de cet atypoique duo s’est faite dans une sorte de voyage astral, elle se consolidera dans la vraie vie, tous deux menant l’enquête à proportion de leurs facultés respectives.
Gagnol et Felicioli ont parfaitement saisi cette complicité et cette complémentarité, donnant lieu le plus souvent à des situations cocasses (certains moments sont très drôles) ou légèrement anxiogènes (l’univers du chef mafieux, la maladie). Ce contraste apparaît également graphiquement. Les scènes où apparaît l’homme au visage cassé (dont on ne connaîtra jamais l’histoire au final) se passent de nuit ou brossées dans un camaïeu de gris, soulignant un monde matérialiste dur, fragmenté, en souffrance. A l’inverse, le monde généré par Léo est aérien, affectif, rutilant d’un bleu éclatant et autres couleurs chaudes. Une espèce d’antinomie picturale qui irait de Pablo Picasso à Saul Steinberg.
Le scénario se tient également, en occultant toutefois le côté un peu niaiseux du final, et donne lieu à une aventure policière singulière pour tout public. Les voix que les comédiens prêtent aux personnages y sont pour beaucoup, notamment le ton fumiste d’une Edouard Baer, le timbre sobre de Gaspard Gagnol ou encore la gouaille rocailleuse de Jean-Pierre Marielle, entre autre, La partition de Serge Besset est également à souligner, elle est parfaitement calquée à l’action.
« Phantom boy » est un film d’animation plein de sensibilité et de délicatesse, au message positif, qui redonne un certain goût de rêver, et de croire à nouveau, malgré le conformisme plombant de notre époque, que tout est possible.