Une œuvre absolument sublime visuellement. La beauté plastique de Blade Runner ne peut que subjuguer tant elle est riche et créative. L'ambiance noire distillée dans ce Los Angeles cyber-punk confère au récit une tonalité mélancolique lourde et oppressante. Le spleen qui se dégage du récit, les sentiments de solitude et de décadence qui émanent de ce monde artificiel et déshumanisé... tout cela est mis en valeur par une composition musicale de haut niveau signée Vangelis, parfaitement adaptée, qui reste un élément phare du film. L'adéquation de la musique et de la photographie laissera à coup sûr une trace indélébile dans la tête du spectateur.
Tout cela constitue la raison pour laquelle on peut considérer LE long-métrage de Ridley Scott comme une référence en matière de science-fiction au cinéma. C'est sûr, ce film a inspiré, inspire et inspirera toujours les réalisateurs de sf tant la forme est léchée.
Le fond n'a en revanche franchement rien d'original ni d'extraordinaire. Cela est basique, mais soit. Ces sujets là ne finiront jamais d'être exploités tant ils peuvent être passionnants. Le problème, c'est que pour moi cela ne l'est pas (passionnant). Je me suis vu réellement indifférent face aux enjeux de l'histoire et à sa progression dramatique ; la faute à un certain manque d'intérêt pour les personnages et surtout à un rythme inutilement lent.
Déjà, je n'arrive pas à percevoir une potentielle complexité des personnages. J'admets qu'ils finissent par évoluer, mais je ne peux que les trouver monolithiques dans leurs agissements du début du récit, jusqu'à l'affrontement final entre Deckard (perso principal) et le dernier Nexus 6. Cet aspect unilatéral des personnages, exploité durant la quasi-totalité du film, ne favorise pas à créer de l'intérêt pour l'histoire ; SURTOUT que le seul côté des personnages perçu par le spectateur est déshumanisé et antipathique. Qui veut dire personnage antipathique veut dire abscence d'empathie, de pitié, et plus généralement une indifférence quant à sa situation, son état, ses choix et leur finalité. Qui dit indifférence quant aux personnages, dit abscense de tension dramatique. Or cela est important dans un film comme ça... Au final, quand Deckard est à deux doigts de mourir, je ne ressens aucune émotion. Et par conséquent, quand le replicant le sauve, c'est pareil : aucun bouleversement dans mon être. Je ne sais pas vous mais moi j'attends d'un film qu'il me transporte, qu'il me bouleverse au moins un peu non ? Bon, là ce n'est pas le cas et j'ai trouvé ça révelateur d'un problème scénaristique conséquent (même un Marvel me fait plus réagir !). Alors oui, le cinéma n'offre pas que ça comme démarche, et tant mieux ; mais quand même, c'est toujours appréciable d'être un minimum investi dans l'histoire.
Cela aurait pu marcher si le film était plus court, plus percutant. Au lieu de ça on a le droit à 3 ennuis - 1 légitime (celui du spleen inhérent à l'œuvre), 1 possiblement acceptable (la conséquence ou l'inconsequence de l'évolution trop tardive des personnages) et 1 inacceptable compte tenu du précédent (celui du rythme). Là le fil narratif est trop étiré ! On tire on tire avec de l'inutile et au final on oublie l'utile. Et qu'est-ce que l'utile me direz-vous ? Eh bien je répondrais sans prendre trop de risques que l'utilité de ce film réside dans son questionnement sur l'humanité. Là est le propos, là est le sens du film, là est ce vers quoi il veut nous amener. Mais au final cet axe thématique est bien trop peu développé. Et au final, si certains diront que le scénario est complexe, riche, intelligent, je veux bien le croire mais je n'arrive pas à le voir. Je pense que c'est un scénario extrêmement banal et qui ne pose pas de questionnements si intéressants que ça, ou alors Scott n'a pas réussi à les mettre en relief. Et concernant la possibilité que Deckard soit replicant, c'est le genre de remise en cause qui passionnent certains gars mais qui moi me laissent de marbre.
En somme, je considère que c'est une œuvre moyenne car elle "se laisse regarder". Pas plus. Le plaisir est moyen. Pas d'implication émotive ou intellectuelle.
Un film qui mérite son statut de film culte mais qui est très loin du chef d'œuvre.