S’il semble en fin de compte tiré d’un nom d’une certaine machine écrire, le titre, Populaire, semble plutôt définir le premier film de Régis Roinsard. Oui, qu’il parle de concours de dactylographique d’émancipation féminine par le travail, il en va sans dire que le film est populaire, comme ce doivent de l’être les comédies françaises dignes de ce nom. Si en soi, le film ne casse pas des briques, force est d’avouer l’intérêt suscité très vite par la fameuse compétition de secrétaires enragées du clavier qui verra notre gentille fille du village devenir l’idole de sa profession, de la jeunesse féminine. Roinsard peut aussi se targuer d’avoir admirablement reconstitué une époque d’après-guerre sans le moindre faux pas. Un sens du détail inexorablement bénéfique au résultat visuel du fil amène le public à se demander au l’équipe du tournage à bien pu dénicher toutes ses vieilles babioles des années 50. Remarquables dans les costumes, les objets du quotidien, dans la musique d’époque, Populaire est avant tout un exemple parfait de film rétro.
Passé sur une esthétique excellente, un thème bien plus socialement important qu’il n’y paraît pointe le bout de son nez et monte en puissance. Il est question, par le biais de l’avènement du métier de secrétaire en province de l’émancipation de la femme. On offre dès lors la possibilité aux caissières, aux ménagères, les possibilités de côtoyer le patronat, ce qui, mine de rien, représente l’Eldorado pour bien des jeunes femmes. Notre amie Rose tente sa chance auprès d’un assureur, Louis, qui voit en elle une secrétaire médiocre mais une dactylographe de talent. Par esprit de conquête, par amour de la gagne et de la notoriété, notre assureur prend sous son aile la brave Rose afin de l’emmener aussi loin que possible dans cette curieuse compétition d’un autre temps. Bien entendu, naîtra entre eux deux une relation telle qu’on pouvait l’attendre sans broncher.
Originalité dans le thème mais simplicité dans la manière. On en viendrait presque à tirer des rapprochements entre le film de Roinsard et l’Industrie cinématographique américaine lorsque cette dernière produit des films sportifs, sur une compétition, quelle qu’elle soit. Un film français, cousin malgré tout de certains Mistery Alaska, Pour l’amour du jeu et non rien de moins que Rocky, dans l’esprit. C’est finalement une version singulière d’une compétition féminine acharnée qui se situe entre deux époques, entre celle d’aujourd’hui et celle d’avant, celle qui voyait les pères décider pour leurs filles et j’en passe. Tout est globalement assez intéressant hormis la romance inévitable entre l’employeur et sa protégée, relation qui passe, il ne pouvait en être autrement, par tous les stades.
Coté casting, l’on saluera bien volontiers la performance artistique de la jeune Déborah François, jeune actrice prometteuse qui laissera sans doute sa marque dans le cinéma français. Quant à Romain Duris, d’ordinaire excellent booster qualitatif d’un film, il est ici l’inverse. L’on peine sincèrement à cerner son caractère lunatique, ses intentions encore d’avantages. Non pas que l’acteur se soit fourvoyé, je pense simplement que l’écriture de son rôle fût plus que laborieuse, n’oublions pas qu’il s’agit là d’un premier film. L’on mettra finalement de côté le personnage de Louis pour nous centrer sur celui de Rose, le plus important et le meilleur de tous. Les passages de Miou Miou, Eddy Mitchell et les quelques apparitions de la nouvelle star Bérénice Béjo, n’ont que très peu d’importance. L’esprit de compétition et la fébrilité de la championne de dactylo en devenir sont indéniablement les points forts d’un film pour lequel l’on ne perd pas notre temps et qui réjouis sur l’avenir du réalisateur, Régis Roinsard, un nom à retenir. 14/20