Ça nous mortifie de ne pas adorer ce Beetlejuice Beetlejuice, alors qu'on voit combien Burton s'est fait plaisir (le bébé "Braindead" : Papy Burton s'éclate), met de bonnes intentions, un cœur palpitant dans un film de producteurs autrement cadavérique. Ce second opus refait quasiment à l'identique ce que l'on a retenu du premier, comme si les producteurs nous tendaient une check-list, en nous disant : "Tu as vu, il y a la
maquette avec la musique, comme l'ouverture du premier, et la chanson Day-O, le gag de la bouche cousue, la tête de Beetlejuice qui fait "bouh" de dos, le ver des sables, et exactement la même fin
que le premier film !" Mais pour ceux que le fan-service abusif inséré au forceps ne trompe pas, on va se l'avouer de suite : le scénario est bancal. On assiste à une succession de scénettes, dont la plupart n'a vocation qu'à caser des gimmicks (clichés) du premier film, dire que Burton confond la soul avec le disco, inventer une origin-story décevante pour Beetlejuice, ou de suivre cinq minutes un personnage secondaire qui n'a qu'une seule fonction. On a Monica Bellucci qui marche dans des couloirs (et c'est tout) alors qu'on pensait naïvement qu'elle serait la grande méchante de ce 2 (raté...
on se rappelle qu'elle existe à la fin, juste le temps qu'elle se fasse manger par le ver des sables dans l'église... Oui, c'est littéralement la même fin, on nous prend vraiment pour des gogos prêts à revoir dix fois le même film
). On a Justin Theroux en cliché du beau-père insupportable, le jeune homme dont on a capté directement le secret ("Mais pourquoi ses parents sont filmés de dos, et ne disent rien... Ah. Bon, j'ai compris, à dans vingt minutes pour la révélation."), on a en coulisses une équipe technique qu'on adore d'habitude, mais qui est ici imperceptible. Que cela soient les décors de Bo Welch, les costumes et maquillages de Colleen Atwood, la musique de Danny Elfman : tout fait bâclé, l'ancien faisait mille fois mieux (avec beaucoup moins de budget, mais des idées pour compenser). Le film n'a aucun problème à ne pas faire revenir les fantômes Maitland (nos chouchous) sans trop d'explications, mais se complique la vie avec le "cas embêtant" de l'acteur black-listé Jeffrey Jones (on jongle avec de la pâte à modeler moche, du gros platoc doublé par un comédien imitateur vocal, et une histoire à dormir debout, pour faire en sorte que le personnage disparaisse sans disparaître, car "c'est bête", il est le moteur de rencontre des personnages... Damned, il y avait plus simple comme scénario : Monica est méchante, non ? Pourquoi n'a-t-elle pas enlevé Jenna, ou Winona, comme elle était "l'ex" de son amant Beetlejuice, et tout le monde part à sa recherche... C'est peut-être simple, mais on aurait évité tous ces ronds-de-jambes ridicules avec le cas Jeffrey Jones, et Monica aurait fait autre chose que marcher dans les couloirs). On a beaucoup soupiré (le néant d'intérêt du rôle de Willem Dafoe, les maquillages réalisés au fusil à pompes, les sympathiques "Bob" dont l'effet spécial "vraiment à l'ancienne : on voit presque le gars dessous" jure carrément avec les effets numériques ignobles du début - les bouts de Monica... -, l'utilisation en sous-régime des trois actrices de rêve qui sont les têtes d'affiche...), mais : on ne peut pas haïr ce Beetlejuice Beetlejuice. Parce qu'on a sourit une ou deux fois (la
pierre tombale en forme de dent de requin où est gravé : "Father. Husband. Bird Watcher."
en épitaphe, oui, ça nous a eu), et surtout parce qu'on sent à chaque seconde que Burton est content de ce qu'il fait. Contrairement à ses commandes disneyiennes où son nom apparaît dans le générique, sans plus, ici on voit qu'il a lâché les chiens, quitte à verser dans le gore, dans des délires qui le font rire ("et peu importe qui rira avec moi"), et dans une frénésie dont il a le secret. Il y a mis tellement de coeur, qu'on le soutient, quelque part derrière les producteurs accrocs au fan-service (les vrais zombies du cinéma).