La première question qu’on se pose lorsque la lumière se rallume dans le cinéma, c’est « Pourquoi ? ». Pourquoi faire un remake du film de 1991 si c’est pour l’affadir, pour lui donner sur la forme l’air d’un film pour ado et sur le fond l’affubler un message judéo-chrétien tellement appuyé que cela en devient risible ? Le film initial avait l’attrait de la nouveauté et de l’originalité, il était porté par un réalisateur qui savait ne pas en faire trop et par des comédiens au charisme autrement plus puissant que le remake de 2017. Sur la forme, Niels Arden Oplev déçoit quelque peu, lui qui avait réussi à mettre en image le difficilement adaptable « Millenium » livre ici un film clef en main, avec des scènes qui font sursauter appuyé par une musique angoissante qui prépare le spectateur et semble lui dire « attention, là, tu vas sursauter ! ». Même s’il réussit à bien rendre à l’écran les expériences « positives » avec des couleurs, des travelings, une jolie photographie, lorsqu’il s’agit de rendre les expériences « négatives » et les hallucinations qui suivent, il opte pour le cliché, les lettres de sang, les endroits abandonnés, les apparitions au teint grisâtre et aux yeux exorbités ! Ce peut impressionner les ados (c’est peut-être à eux que le film s’adresse, après tout) même si je pense qu’ils en on vu d’autres ! Techniquement c’est propre mais d’un classicisme un peu désespérant. Le genre « fantastico-thriller » est genre qui mérite que l’on soigne la forme, puisque le fond est presque connu d’avance. Les acteurs font de leur mieux mais ils n’ont pas le charisme nécessaire pour incarner des rôles trop peu écrits et sans profondeur : Ellen Page (moyenne), James Norton (caricatural), Nina Dobrev (rôle pas assez écrit, manque de profondeur), Kiersey Clemons (pas convaincante et assez vite énervante). Seul Diego Luna surnage dans un rôle là encore trop superficiel mais il confirme la bonne impression qu’il avait laissé avec « Rogue One » l’année dernière. Oui, ils ne sont plus 3 comme dans le film initial mais 5, surement pour pouvoir mettre en scène des histoires différentes, entrecroiser les destins, ou tout simplement multiplier les occasions de se faire peur. Là où le film de 1991 proposait, si ma mémoire est bonne, des relations complexes entre les 3 étudiants (une sorte de triangle amoureux venant tout compliquer), ici, on se concentre sur les expériences et leurs conséquences, c’est plus cinématographique. Le film initial ne se concentrait que sur l’expérience raté de l’un d’entre eux.
Or, ici, les 4 qui tentent l’expérience ont tous des problèmes puisqu’ils sont tous coupables de quelque chose. Le seul qui ne tente pas l’expérience, le seul qui semble vaguement avoir conscience du problème éthique que pose ladite expérience est peut-être le seul qui n’aurait rien à se reprocher, c’est quand même dommage
!
Oui, ils ont tous fait quelque chose de mal, à des degrés divers, et ce mal vient des hanter après l’expérience comme les péchés viennent hanter les pêcheurs au moment du jugement dernier. Pour se débarrasser des visions horribles, il leur faut bien entendu expier, demander pardon, réparer. Plus judéo-chrétien comme message, tu meurs !
Ce n’est même pas fait avec grande subtilité, encore qu’on nous épargne la petite visite à l’Eglise que je craignais de voir arriver pour couronner le tout ! Franchement, on ne croit pas à tout et là, je ne parle pas de l’ « après » dont, comme tout le monde, je ne sais rien. Mais la facilité avec laquelle Courtney arrive à faire tomber les barrières morales de ses petits camarades, alors qu’elle a à faire à des futurs médecins (qui devraient donc être très ultra concernés par les questions éthiques), les réanimations dont aucune ne se déroulera comme prévu, l’attitude des réanimés après leur expériences (qui se saoulent et font la fête à peine quelques heures après avoir eu le cœur à l’arrêt), tout sonne too much, pour ne pas dire un peu ridicule. Là encore, c’est plus facile de faire ce genre de raccourcis que de poser les vraies questions que pose cette « Expérience Interdite » : l’éthique, les conséquences physiques (et pas seulement cérébrales), et surtout LA question essentiel : qu’est ce que cela apporte aux vivants de savoir ce qui se passe après la mort ? Est-ce une curiosité à laquelle on doit essayer de donner une réponse ? Sans exiger que le film remplace un devoir de philo sur la question, on aurait pu espérer un peu de hauteur de vue sur un sujet si prometteur. Au contraire, ici, on se retrouve devant un thriller fantastique lambda, formaté, sans profondeur ni imagination. Si j’ai gardé un souvenir net du film de 1991 qui n’était déjà pas un chef d’œuvre, que dire du souvenir que laissera cet improbable remake ? Je sens qu’il s’estompe déjà au bout de quelques heures. Finalement « L’Expérience Interdite Flatliners » porte bien son titre. C’est une expérience dont on peut assurément se passer.